To live in a city is to live in a community of people who are strangers to each other. You have to act on hints and fancies, for they are all that the mobile and cellular nature of city life will allow you. You expose yourself in, and are exposed to by others, fragments, isolated signals, bare disconnected gestures, jungle cries and whispers that resist all your attempts to unravel their meaning, their consistency. […] The city, our great modern form, is soft, amenable to a dazzling and libidinous variety of lives, dreams, interpretations.
(Jonathan Raban, Soft City)
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#68
Toujours au sujet des « villes rêvées », l’une des choses les plus épatantes qui me soit arrivé lors d’un rêve fut d’y être presque conscient de ce qui se passait. Je sais que certaines personnes sont supposées savoir diriger leurs rêves — pour ma part, hélas, je n’ai pas cette faculté de « rêves lucides ».
Sauf une fois: je me trouvais dans une belle ville assez champêtre, française & provinciale, pleine de petits jardins & de places ombragées, dominée par un grand coteau dans lequel grimpait de larges escaliers de pierre beige. Un château s’étendait sur une colline au pied du coteau — muraille grise, grands arbres, belles demeures blanches serrées autour du parvis du pont-levis… En redescendant du château vers la ville, je remarquai d’abord une petite place qu’il me semblait avoir déjà vu — lorsque je réalisai qu’il s’agissait d’un coin de Roanne. Du vrai Roanne!
Et en le comprenant, il me vint soudain à l’esprit que je me trouvais dans l’un de mes rêves de ville. En continuant à descendre la petite rue sur laquelle pesait les hautes frondaisons des bouleaux, je me dis qu’il y avait décidément beaucoup de monde, aux terrasses des cafés, ou tout simplement assis dans l’herbe, papotant, buvant, tout le monde très relax, une ambiance de vacances, d’été. C’est en débouchant au bout de l’allée bordée d’arbres, à l’angle d’un carrefour qui ouvrait sur un pont au-dessus de la rivière (très large, style la Loire à Tours), que je pris conscience pour la seconde fois d’une donnée importante de l’univers où je me trouvais: bien sûr! me dis-je. Il y a beaucoup de oisifs, parce qu’en fait nous sommes dans une utopie. Et d’ailleurs, je fis quelques pas de plus vers le pont qui faisait le gros dos devant moi — et de l’autre côté, dominant le quartier sur la rive d’en face, des collines portaient les silhouettes caractéristiques d’éoliennes. Une écotopie! me redis-je, ravi, le coeur content. J’allai m’asseoir à la terrasse d’un café, là, au bord du quai — et je me réveillai alors.