Pour ma part je l’aime, la neige.
Douce surprise en sortant du blockhaus commercial, ce soir, que ce rideau léger qui tombait sur une ville déjà très largement en-ouatée. Je descendis l’escalier de la bibliothèque en savourant le « crounch crounch » de la neige sous mes pas. Dans l’allée, les yeuses voyaient leurs sombres ramures éclaircies comme une chevelure poivre-et-sel. Sur l’avenue, la sotte circulation automobile n’était pas encore parvenue à réduire le blanc tapis en sloch brunâtre. De l’autre côté de la gare, le jardin des Petites Soeurs semblait fantomatique, nimbé d’une minuscule danse rosée, toutes les branches surlignées d’un bel éclat blanc. À l’angle d’une rue, des rires d’enfant éclatèrent: bien sûr, la neige appartient à leur mythologie.
Cette nuit est totalement lumineuse, le paysage des toits familiers dort sous la couverture d’un gris-rosé auquel répond exactement le ciel. Lyon est transfiguré, au moins le temps d’un passage nocturne — demain nous verrons bien ce qu’il en restera.
Et je pense bien entendu au tableau de Gustave Caillebotte. Oui: j’aime cette neige, si rare chez nous & si esthétique pour le moment.