Tableaux Tuileries (12)
Cinquième & dernier jour. Je me suis réveillé triste. À l’image du temps: bruine persistante, chape grise du ciel & flou de la brume. Peut-être s’agit-il de l’humeur adéquate, pour découvrir les broussailles du bois de Vincennes? Olivier supporte mon spleen en faisant le clown, tandis qu’un peu au hasard nous franchissons les sous-bois depuis le lac de St-Mandé jusqu’au Lac Daumesnil, en passant par les abords du zoo dont le rocher me sert de repère.
L’ex-musée des arts océaniens & papouasiens vient de se faire renommer « Palais de la Porte Dorée », mais pour le réac que je suis ce sera toujours le Palais des Colonies. J’étais d’ailleurs fort curieux de voir ce lac Daumesnil, autour duquel s’étala autrefois cette « Exposition coloniale » dont j’ai le témoignage sous la forme d’un énorme album d’époque.
La nature du bois de Vincennes m’étonne par son décoiffé: rien de domestiqué en-dehors des sentiers savamment balisés pour tous les amoureux du couple survêtement/halètement, que l’on croise même par ce temps maussade en pleine activité d’étirements (flûte, que le sport peut être inesthétique!). Le sous-bois se déploie en des vagues hirsutes d’herbes trop hautes, de fougères desséchées, de grêles brindilles & de feuilles mortes. Tout cela nous fait une symphonie impromptue de vert & de roux, gommée aux entournures par une hésitation laiteuse qui s’insinue en gouttelettes sous la veste & qui ouate le bruit des pas. Le ciel blanc-bleu empaquette Vincennes d’un voile liquide.