Je ne sais s’il était paru depuis longtemps, mais je viens juste de trouver un album de bédé par un dessinateur que j’aime beaucoup, Jean-Philippe Peyraud. La Bouche sèche (chez Treize étrange). Coïncidence, je l’ai lu alors que des tangos de Piazzolla tournaient dans la chaîne. Jolie adéquation.
En dix nouvelles, Peyraud livre de ces petits instantanés d’existence qui font également la force d’un Adrian Tomine, par exemple. Sauf que Peyraud ne se livre pas à la cruauté ultra-moderne, sa touche à lui c’est une tendresse, une mélancolie, et par moment un peu de couleur: quelque part entre Marquet et Matisse, dans des décors du Paris actuel — ses bédés feront de beaux portraits ethno-historiques, plus tard. Tout de suite, c’est également d’une forme d’anthropologie qu’il s’agit, celle des sentiments ordinaires, des petits riens qui sont comme autant de fêlures quotidiennes. Des tranches de vie allant du touchant (ma favorite, « Quand tu dors la nuit ») au glaçant (la suivante), en passant généralement par un léger spleen. C’est tout un art du pincement de coeur.