Bordeaux, II
Ville excessivement minérale, parce que derrière les « échoppes » (demeures traditionnelles) s’alignent des jardins, que ne trahit que le sommet hirsute d’un palmier, de temps à autre.
À Bordeaux, la rue Dieu est une impasse, et à l’ampleur lumineuse des quais courent parallèles de sombres coupe-gorges.
Ville tavelée: dans les grandes rues se succèdent les façades toutes de blond rendu, celles qui déjà se fanent dans un gris terne, et celles enfin que l’on n’a pas (encore) tenté de rajeunir, qui conservent le même maquillage de suie que du temps de mes années étudiantes.
Les toits pour leur part jouent une gamme du rose tendre au noir charbonneux, sur le dos rond des tuiles, alignées en vaguelettes.
Le soleil d’orage fait luir les vieux os de la cité. Le gratte-semelle qui arrondit son cerceau au bas des deux-trois marches de chaque perron. La fente verticale de la boîte aux lettres, sur le côté de la porte, cernée de marbre sombre. Les murs jamais repeints arborant encore les fantômes d’enseignes commerciales. Les lampes en cuivre qui se balancent au-dessus des chaussées pavées.