#1920

Et toi André, qu’est-ce que tu as fait, aujourd’hui? Eh bien moi, j’ai été me promener, depuis la rue des macchabées jusqu’à la rue des trois artichauts. Véridique. Grande promenade à travers les collines, en passant par le cimetière de Loyasse qu’apprécie particulièrement mon camarade Olivier — où je suis tombé sur la tombe des Berna – Sabran, soit donc la famille de l’auteur policier / jeunesse Paul Berna et de son frère l’illustrateur Jean Sabran. À l’entrée, la tombe ultra-laïque et géométrique d’Edouard Herriot. Paraît qu’il y a aussi celle d’un magicien nommé Maître Philippe, pas trouvée, faudra qu’on y retourne.

#1919

Revu Les Vacances de Monsieur Hulot. Période doublement propice, forcément: l’été, bien sûr, mais aussi mes travaux de mise en page actuels sur Les Nombreuses vies de Nestor Burma, dans l’incroyable silence de la ville en août — les années 1950, bien sûr. Chaque fois que je travaille sur un BR, je redécouvre ce charme de la collection: peindre le portrait d’une époque, des ambiances, des décors d’un temps. L’envie m’est donc venue de revoir Hulot — m’avait échappé sa ressortie restaurée, enfin. Longtemps que je ne l’avais vu, j’avais oublié certains passages. Magie des retrouvailles, alors: pour moi, Les Vacances de Monsieur Hulot ont définitivement un goût d’enfance. Parce que j’ai vu et revu ce film étant môme, puisque la télévision rediffusait l’un ou l’autre des Tati chaque été. Et puis dans mon imaginaire, la plage de St Marc sur Mer c’est également celle de St Brévin, en face, juste de l’autre côté de l’estuaire. Toujours ai-je eu l’impression qu’à regarder Hulot sur le sable, je voyais en quelque sorte les vacances de mon père, de sa famille. Monsieur Hulot, Gaston Lagaffe: des figures intimement liées à une certaine image que je me fis de ma famille, une couleur de ma jeunesse.

#1918

Amusant passage dans une nouvelle de Sexton Blake datant de 1917 (c’est-à-dire, donc, dans une littérature très populaire, Sexton Blake étant une sorte de Sherlock Holmes produit en masse, dans des textes hâtivement rédigés et emplis d’une naïveté enthousiaste). N’étant plus à une incohérence narrative près, l’auteur nous délivre soudain sa vision de la vie parisienne et intervient à la première personne… « And the first flush of dawn was tingeing the sky as they rolled into the Gare du Nord, and a horde of chattering porters and officials swept down upon them. Paris in the early dawn is a Paris rubbing its eyes drowsily and going to bed, wherehas in London that is the hour when the city awakes and the wheels of labour are set in motion. No one ever seems to work in Paris – at least, you apparently see no signs of toil. I don’t know whether it is because the industrial quarters are securely hidden away, or whether it is that the Parisian takes such a cheery pleasure in his work that it is not recognisable in that guise. »

#1917

La collection que je dirige chez les Moutons électriques avec Xavier Mauméjean, la Bibliothèque rouge, va fêter en février prochain son vingtième titre. À cette occasion, et sur une suggestion de Xavier, nous mettons au point un nouveau « look » pour la collection, et une nouvelle manière de la réaliser, afin de la prolonger et de la rafraîchir. Et alors que notre directeur artistique, Sébastien Hayez, étudie tout cela, je réalise que plusieurs titres vont nécessiter une réédition à terme proche… À savoir, outre le Sherlock Holmes, également le Hercule Poirot (juste épuisé), le Arsène Lupin (dont la deuxième édition approche de sa fin, déjà) et le Jack l’Éventreur. C’est ma foi autant de bonnes nouvelles, car cela démontre combien cette collection marche de façon satisfaisante, en « long-sellers ». Et le coup de neuf que l’on donnera à chacun de ces volumes, pour être moins radical que celui pratiqué sur le Holmes, devrait cependant leur donner une nouvelle actualité satisfaisante.

Je me réjouis aussi, je le reconnais, de constater que ce sont les titres que j’ai co-signé qui se vendent le mieux. Et puis, pour rester dans les bonnes nouvelles qui font chaud à l’ego d’auteur, Seb Hayez m’a montré hier soir sa couverture pour Le Garçon doré. Il s’agit de mon petit recueil de nouvelles fantastiques, qui doit sortir chez la Clef d’argent. À l’automne, je présume. Doit aussi sortir en fin d’année La Quête du Monde noir, le troisième album illustré que je cosigne avec Fabrice Colin, pour Hachette Jeunesse (et le deuxième dans cet univers du Monde noir que nous avons imaginé). Enfin, je viens de recevoir le contrat pour Les Trois coeurs, mon deuxième polar jeunesse pour Mango (avec les mêmes héros que Le Voleur masqué). Je viens d’en débuter l’écriture, avec grand plaisir. J’ai déjà des idées pour un troisième et un quatrième, en fait.

#1916

Alors que je faisais le constat que je ne sortais pas assez de chez moi, quand je suis à Lyon, et qu’il me fallait aller me promener plus souvent, mon ami Olivier décidait de son côté de nous devions… nous promener. Eh bien soit, ce fut fait aujourd’hui. Avec une balade par ses soins imaginée qui nous fit grimper dans St Just (village perché sur l’une des collines lyonnaises), continuer jusqu’à Ste Foy puis La Mulatière, et revenir par le quai Rousseau enfin rendu aux piétons car le coteau, de longue date retombé en friche, menace de s’effondrer: la sacro-sainte circulation automobile n’est plus possible… Ensuite, après halte frites vers Perrache, nous traversâmes l’atroce échangeur seventies de ce bon Pradel (un maire mégalo qui constella l’agglomération du pire des lubies pompidoliennes), pour rejoindre la zone en travaux dite de la « Confluence ». C’est-à-dire l’extrémité de la presqu’île lyonnaise, longtemps laissée à l’état de friche post-industrielle et que l’on redéveloppe maintenant, malgré le handicap des emprises ferroviaires, afin de la transformer en quartier chic et branché. Mondialisation oblige, on se croirait donc tout aussi bien à Brooklyn, ou bien à Londres, à moins qu’il ne s’agisse de Liverpool ou de Nantes? Mais c’est beau, cette architecture réellement contemporaine, ce début de canal nouveau, ces passerelles, et surtout: ce quai mêlant vieux rails, portiques industriels et nouveaux bâtiments aux lignes singulières. Ça m’a également rappelé le réaménagement des quais à Bordeaux. Enfin quoi, c’est bien, il y a là un peu d’ambition — alors qu’en face, côté Rhône, le quartier neuf de Gerland, autrement plus vaste, fut victime de la courte vue de la municipalité Barre et de sa médiocrité intellectuelle. Gerland est une laide zone d’immeubles sans goût ni vie, de cette prétendue « architecture » commerciale des constructeurs de « quartiers résidentiels » comme on nous en pourri tout le paysage urbain. Tandis que la Confluence émerge comme une belle zone d’ambition urbanistique.

Les deux rives: le passé châtelain abandonné… (avec un nouveau concept: la voiture plate)

.. et la nouvelle confluence, en construction.

Le nouveau quai…

… et le gruyère psychédélique du plus audacieux des nouveaux bâtiments.