#1802

Dans une vie antérieure, j’ai longtemps bossé en librairie de bédé. Et je m’étais toujours juré que, lorsque je quitterai cet emploi passablement ingrat, je m’abonnerai à Spirou.

Et je l’ai fait, mais hélas une nouvelle formule fut lancée qui ne me plaisait pas du tout, et je laissai tomber cette revue. Avec l’arrivée du nouveau rédac-chef, Frédéric Niffle, Spirou m’a de nouveau séduit et je me suis réabonné, retrouvant donc le plaisir de recevoir tous les vendredis (enfin, quand la Poste daigne faire son boulot) mes 52 pages de bédés Dupuis. Et je suis très attaché à cela, à cette « dose » de bédé hebdomadaire — en dépit du fait que, inévitablement, tout ne me plaît pas tout le temps. Quand ils publient un épisode de « Papyrus », par exemple, brrr, cette horreur! De Gieter n’a jamais été bon, mais de nos jours c’est pire que tout, maladroit et tremblotant. Quant à Raoul Cauvin, franchement, j’attends avec impatience qu’il prenne enfin sa retraite, car il parsème le journal de bandes réactionnaires et gentillettes, assez pesantes.

Reste que cette semaine j’étais content: sous une très belle couverture, débute une nouvelle série par les Kerascoët, sur scénario de… Hubert, ce scénariste que j’ai justement découvert tout récemment et que j’adore déjà, un formidable « raconteur d’histoires » comme je les aime. Je suis également très content de voir mon copain David de Thuin en ces pages, car j’admire infiniment son dessin — mais le scénario, hélas… Aïe! Non seulement c’est du Cauvin, mais le sujet est, pour dire le moins, scabreux et de très mauvais goût, à l’extrême limite de l’homophobie. Pauvre David, contraint de dessiner cela. Et ça tombe d’autant plus mal que, justement Spirou commence à aborder le sujet de l’homosexualité. C’est le cas dans « Mon pépé est un fantôme » de Taduc (toujours agréable), et mieux encore dans « Tamara » de Darasse, qui depuis que son héroïne sort avec le beau mec de la classe, est une bande qui a acquis une douce maturité, et dont l’un des persos secondaires est gay. J’aime bien voir la manière dont, dans des bandes classiques pour pré-ados, un sujet aussi « sensible » est finalement être traité. Faudrait juste que ledit journal parvienne à bloquer chez pépé Yann ses bouffées d’homophobie récurrentes qui entachent des albums one shot de « Spirou & Fantasio » par ailleurs assez bien troussés.

#1801

« Tu blogues sans arrêt ! »
« Comment tu fais pour écrire tant de livres? »
« Dis donc, tu n’arrêtes pas. »
J’entends beaucoup ce genre de commentaires, qui m’amusent et me surprennent un peu. Franchement, je songe souvent à des textes pour ce blog, que finalement je ne prends pas le temps de rédiger, pour plein de raisons. Je pourrais donc plus bloguer, en fait.
Et idem pour l’écriture de bouquins: comme le dit Fabrice Colin, c’est bien simple, il suffit… d’écrire chaque jour. A force à force, ça en fait, des lignes! Et ça en fait, des bouquins.

Je pourrais, je voudrais, je rêverais d’écrire plus, d’ailleurs, beaucoup plus. Ce qui m’en empêche? A la fois la direction au quotidien des Moutons électriques, qui me « bouffent » un temps considérable — je ne m’en plains pas, je constate seulement: comme chantait cette chère Joséphine, j’ai deux amouuurs, mon écriture et ma maison d’édition. Et puis, aussi et hélas, ma forme physique. Non pas que j’aille mal le moins du monde, mais tout de même, c’est qu’on ne rajeunit pas, mon bon monsieur. Je fatigue plus vite qu’antan, au moindre trouble du sommeil ou au moindre bouleversement de routine (comme en ce moment du fait des travaux) je suis crevé, ai mal au dos, bref, je ne suis plus tout jeune, quoi. Alors je gère, j’écris autant que possible, mais en sachant que ça ne sera jamais assez à mon goût.

#1800

Lorsque parfois je me réjouis de lire « uniquement pour mon plaisir », ce qui arrive assez rarement en dehors des bédés, je sous-entends bien sûr que tout le reste du temps, je lis avec en arrière-pensée telle ou telle recherche, la documentation propre à un projet d’essai, le matériau d’un article ou d’une publication des Moutons électriques. Mais il me faut tout de même bien avouer une certaine hypocrisie à exprimer ainsi une forme de soulagement: en réalité, bien sûr, j’adore lire avec une arrière-pensée. Cela donne à mes lectures d’autres profondeurs, une « tâche de fond » intellectuelle qui est généralement plaisante. Ainsi viens-je de finir de lire les 6 premiers « Bryant & May » de Christopher Fowler — avec un intense plaisir, et peut-être en reparlerai-je ici — tout en songeant à un bouquin sur Londres. De fait, mes réflexions de travail tournent en ce moment sur mes obsessions principales et récurrentes: Londres et le Royaume-Uni, en vue de la rédaction/direction possible de volumes sur les fictions de Londres, sur le mythe anglais et sur l’imaginaire du Blitz. Et donc d’embrayer sur Capital de Maureen Duffy, roman sur Londres datant de 1975, dont j’avais lu une recommandation par Moorcock et que je viens soudain de retrouver, à la faveur des séismes secouant mes pénates, transformées en salle des archives selon Franquin.

#1799

Encore une amusante revue petit format, celle-ci surtout intéressante pour une création du studio Bottaro, étonnante version bottaresque de Krazy Kat, en quelque sorte… Ah, comme j’aimerai qu’un éditeur nous propose une belle édition de Pepito et du reste de l’oeuvre du regretté Luciano Bottaro. Hélas, un projet des éditions Cornélius fut interrompu par la mort de l’auteur — cette maison aurait vraiment été idéale pour une telle entreprise (j’admire énormément leur travail).

#1798

Alors là, avouez que comme slogan on a rarement fait mieux: un « journal trognon »! Curieux mélange au sommaire de ce petit format: à la fois du Calvo (« Les mémoires de Coquin le gentil cocker », sur scénario de Marijac) ; du matériel anglais (« Plouf », un décalque modernisé du Vent dans les saules) ; du français (« Sophie et Poilapuce », par Christian Marin, que j’avais dans le temps comme client à la librairie) ; et quelques autres petites histoires à l’origine peut-être anglaise.