#209

Lu: Hatchett and Lycett de Nigel Williams.

Norma Lewis, Dennis Hatchett et Alec Lycett sont amis depuis l’enfance — véritablement inséparables. Fille d’un professeur de l’école pour filles Saldtene School à Crotchett Green (prés de Croydon, dans le sud de Londres), Norma est devenue elle-même enseignante dans cette même école, de même que son copain Dennis Hatchett devenait prof dans sa propre ancienne école, la Kirkby Grammar School. Lycett pour sa part a fait des hautes études universitaires. Et en cette année 1939, alors que Norma & Hattchet reviennent d’un voyage scolaire en France, Lycett se prépare au service militaire.

Les choses se déroulent mal lors de ce retour: outre la nervosité due à la guerre imminente, une prof d’espagnol meurt subitement, dans le train en direction de Calais. Impossible de le dire aux autorités françaises: ils empêcheraient les Anglais de rentrer chez eux! Norma, Hatchett et l’un de ses élèves décident donc de cacher la mort de l’enseignante. Mais pas facile de camoufler un cadavre lorsqu’il faut passer une douane! D’autant que les filles dont Norma a la charge sont surexcitées, complotent des tas de choses comme toutes les gamines, et voudraient bien parler à leur prof d’espagnol…

De retour sur le sol britannique, Norma découvre qu’elle a hérité d’une élève en trop! Une jeune fille surnuméraire, Rachel, qui est en fait une petite juive qui a profité de la complicité des autres filles et de la distractions des accompagnateurs, pour se glisser dans le groupe et aller clandestinement se réfugier en Grande-Bretagne. Elle a même inventé une fable comme quoi elle serait une nièce de Norma. Qui se sent donc obligée de l’accueillir… Impossible de dire la vérité aux autorités: Rachel n’a pas de papiers, et les sentiments anti-juifs sont assez courants dans une Angleterre à l’aube de la guerre mais dont une bonne partie du peuple n’est pas sans trouver ce monsieur Hitler relativement censé…

La narration de cet étonnant roman est un patchwork d’extraits de journaux (des trois personnages principaux) et de flashbacks (vers l’enfance des deux garçons) — des trois, en comptant Lucius, frère jumeau d’Alec exilé au loin pour une raison dont personne ne veut parler). Dans le présent (1939/40), Lycett part subitement avec son régiment, sans prévenir. Lucius revient brièvement (scène hilarante & étrange où Norma, ayant rendez-vous avec Alec Lycett, découvre ce dernier — en fait son frère jumeau — dans les bras d’une de ses élèves!). Dennis ne sait plus que faire pour attirer l’attention de Norma. Rachel, la petite réfugiée, semble ne s’intéresser qu’aux cours de physique — et elle en sait infiniment plus que tous les profs, apparemment son père serait un savant allemand spécialisé dans l’atome. Un homme sinistre s’installe chez un couple de parents d’élèves réacs — et il s’intéresse un peu trop à Rachel. Un des profs de l’école pour filles, Mr Breeze, est soupçonné par tout le monde d’avoir empoisonné la prof d’espagnol — car c’est bien un crime, en fait! Le premier ministre annonce à la radio l’entrée en guerre. Des avions allemands commencent à bombarder Croydon. Le régiment de Lycett s’enlise dans une guerre pour laquelle les Britanniques ne sont pas du tout préparés, entre absurde & tragique…

Et les morts continuent à l’école pour filles! Une deuxième prof d’espagnol est empoisonnée. Puis une troisième est retrouvée étranglée. Dans les trois cas, il s’agissait de vieilles filles un peu toquées, vaguement lesbiennes, en tout cas trop masculines et désagréables… Certaines élèves déclarent qu’elles savent des choses — et se taisent. Ont-elles lu trop d’Agatha Christie? Est-ce la puberté qui les démange? Ou bien l’assassin est-il réellement connu des filles?

Un roman séduisant et très drôle, mais aussi terrifiant et sombre: sous le rire se cache des événements troubles. Et les meurtres sont le moindre des maux qui assaillent cette communauté…

Nigel Williams a un merveilleux sens de la comédie, le personnage de Hatchett est très amusant, un bouffon touchant, les situations et les familles sont en général hilarantes — même au coeur des plus grands malheurs. Et ce n’est pas le moindre des talents de l’auteur, que de parvenir à écrire une comédie à partir d’une intrigue moitié policière moitié espionnage, le tout sur fond de guerre. Immpossible de seulement le résumer, en tout cas de rendre justice à sa réjouissante richesse: ce roman est énorme, foisonnant, ses personnages très nombreux. Pour esquisser quelques correspondances, disons que le sombre secret des Lycett n’est pas sans rappeler l’intrigue de Kate Atkinson dans Human Croquet (Dans les replis du temps en traduction massacrée au Livre de Poche), tandis que le côté « école » m’a nettement rappelé Les Disparus de Saint Agil de Pierre Véry.

#208

Je parlais il y a quinze jours de la revue littéraire Salmigondis: elle a maintenant un petit site web. Nothing fancy, juste leurs sommaires & leur contact — faudra qu’ils étoffent un peu.

Après une absence pour cause de déménagement/absence de connexion, le weblog de ma copine Zabeth vient de redémarrer, avec un long « flashback » sur ses jours de silence involontaire. Chic alors.

#207

Oui, je sais: pas posté depuis (trop) longtemps… Sorry: fatigue, boulot — soucis, the usual suspects. Et puis j’écris pas mal, ces jours-ci, et ne peux tout faire. Ça prend tant & tant de temps, écrire…. Et là j’ai eu deux idées complètes de nouvelles, alors qu’il y en une (dans le même cycle) que je me traîne pas terminée depuis des lustres, tss…

Mes lectures traînent, elles aussi. J’aurai du rendre à Denoël deux fiches de lecture depuis un moment, et je suis à la bourre.

Bon, j’y retourne.

#206

Fini de lire L’École des assassins, de Bellagamba & Day. Hum, c’est un peu trop court, je trouve, il y a des ellipses assez brutales; mais sinon, c’est un thriller captivant — quoique j’avoue que ce ne soit pas ma tasse de thé, les mangas d’action, pas du tout ma culture. J’ai donc lu avec plaisir, mais sans émotion autre: ça n’évoque pas grand-chose en moi, ce style de roman d’aventure hyper-speed. Mais c’est très bien fait, ça c’est certain. Chapeau, rien à redire. Ça « fonctionne » parfaitement. Et si je disais que c’est un peu court, c’est qu’on aimerait en savoir un peu plus sur certains personnages… Et donc qu’ils sont bien campés. Quant au décor, il est archi-bourré de trouvailles techno-futuristes crédibles.

Maintenant, j’ai commencé White Teeth de Zadie Smith — rien à voir, du roman réaliste contemporain, londonien, captivant & drôle. Et je termine de lire le dernier Nigel Williams, une très amusante comédie d’espionnage.