#6125

Fort mal dormi la nuit dernière, les orages tournaient, partaient, voguaient, cognaient, grondaient, et la pluie revenait sans cesse, crépitante ou hésitante. Chaque fois je me disais que c’était excellent pour le jardin, tout ce ciel déversant son eau en grand qui m’éviterait un arrosage matinal. La chaleur, le vent, le bruit, difficile de plonger profond dans le sommeil. Et dans les rues, quelques heures auparavant, les parfums du jasmin et du tilleul exacerbés par la moiteur devenaient presque intoxiquant.

#6124

En septembre prochain, en papier chez Koikalit et en numérique chez Flatland, sortira le neuvième et ventru tome des enquêtes de Bodichiev : Les Mystère de l’Empire ! Toujours par mon alter-ego Olav Koulikov, bien entendu.

Texte de 4e de couverture :
Des signes inquiétants se multiplient à London, la capitale de l’ouest de l’Empire anglo-russe : petits engins entraperçus dans les eaux de la métropole, vagues de panique des rats qui s’enfuient des sous-sol, bruits et rumeurs étranges… Et même plus loin, sur une lointaine plage écossaise, un corps est retrouvé… Il se pourrait même que sur le rivage de la lointaine Stamboul, des complots s’ourdissent…
Après les huit volumes des mémoires de l’enquêteur Bodichiev, voici un roman indépendant brossant un tableau plus large de cet univers parallèle, un roman choral pour un drame d’ampleur internationale. La longue paix de l’Empire est en danger.

#6123

Le matin appartient aux merles, qui jasent et babillent ; le soir aux martinets, qui sifflent. Quelques autres oiseaux y ajoutent de légers friselis, les pigeons quelques roucoulements. Suis triste de la mauvaise nouvelle reçue ce midi, un vieil et admirable écrivain qui commence à avoir des troubles cognitifs. Vague à l’âme.

#6122

Je ne lisais pas de poésie, dans le temps, m’y suis mis lentement et surtout en prose — j’ai encore du mal avec les vers, dont la forme me semble artificielle, et en écrivant cela je sais qu’il ne le faudrait pas, que c’est maladroit, mais voilà, cette impression due à la simple habitude de lire en prose je ne parviens guère à la dépasser. Et puis contrairement aux Anglais, je crois que la poésie n’est pas tant ancrée dans la pratique de lecture des Français, il n’y a qu’à considérer les grands rayons de poésie des librairies anglaises ou écossaises, et la place de la poésie dans la rubrique Books du Guardian, par rapport à ce qui se pratique ici, la marge. Enfin donc, cette lecture de poésie, c’est venu par exemple lorsque mon oncle Jean me conseilla de lire Jacques Réda : ce fut une petite épiphanie et rapidement l’un de mes écrivains préférés, ce poète du récit urbain, tellement conforme à mes goûts qu’il devint même une sorte d’idéal d’écriture, aussi. Et puis Philippe Jaccotet, pour la nature. Deux autres favoris : Etel Adnan, Hubert Voignier. Au fil des ans, ma découverte d’une autre lecture, des lectures, à picorer, légères, courtes, presque de pure esthétique. Et puis aussi, de fil en aiguille, je découvris au-delà de la poésie une forme littéraire « mineure » : la chronique. Des papiers brefs, d’humeur, de contemplation, de commentaire ou de déambulation. Mes goûts pour la psychogéographie m’avaient déjà fait découvrir le piéton de Paris, Léon-Paul Fargue (et son compagnon et disciple, André Beucler). Un souvenir de conversations avec Lionel Évrard, quand il était à Bordeaux durant mes études, me conduisit à cet autre promeneur d’Henri Calet. Un fascicule de Réda m’ouvrit les portes de cet étrange nomade helvète de Charles-Albert Cingria. Il y eut aussi les notes et carnets de Julien Gracq, autre idéal stylistique. Aux édition du Dilettante, de petits recueils si précieux de Pierre Marcelle, Nicole Verdier, Germaine Beaumont… N’est-ce pas formidable, ces écrivains en liberté qui vécurent en proposant ces fragments de pensées, de souvenirs, de promenades ? Comme les blogs des débuts, des carnets livrés à la lecture publique. Avec une poétique du quotidien, de l’ordinaire, de la vie en somme.

#6121

Première fois que j’assiste en direct à l’éclosion d’une fleur. L’annuelle pivoine de ma terrasse se trouvait à l’état d’un gros poing blanc serré, ce matin, et assis dans le coin ombragé pour lire et écrire j’ai, relevant la tête au fil des moments, vu cette grande fleur peu à peu s’ouvrir, en quelque chose comme deux heures. Quant à sa senteur, « capiteuse » est le terme adéquat. Dans le ciel, un orage monte et gronde. La pluie fait sonner le métal de la table de jardin.