Faut-il l’avouer? Je n’ai rien compris à « Hérodias » de Flaubert.
L’autre soir, désoeuvré & ayant envie de me sortir la tête de Jonathan Strange & Mr Norell pour changer, j’ai pris les Trois contes de Flaubert. Le soir-même j’ai lu « Un coeur simple », où j’ai retrouvé tout ce que j’aime chez ce cher Gustave: l’incomparable beauté du style, qui me fait m’arrêter à tant de phrases rien que pour en savourer la cadence et l’esthétique; le portrait de la vie quotidienne du XIXe siècle, & certains de ses usages qui nous sont devenus si étrangers qu’ils en acquiert une forme d’exotisme (si proche, si loin); le cynisme corrosif auquel se mêle en dépit de tout une tendresse légèrement amusée.
Dans la nuit, insomnie, j’ai lu « La légende de Saint-Julien l’Hospitalier ». Que je n’ai guère aimé — le style toujours, oui, mais une époque qui ne m’inspire guère & une constante violence, une fascination pour la chasse & la boucherie, le sang & les chairs, qui déjà m’avait passablement déplu dans quelques pages de ses Voyages. Et puis quelle moral, quel but à ce récit? Des passages de bravoure, mais une impression globale mitigée, une histoire vaine (à mes yeux).
Le lendemain matin, vaillamment je m’attaquai à « Hérodias » — et failli bien caler avant la fin, tant m’étaient incompréhensibles cette civilisation, ces individus, ces complots & motivations… Il faut certainement une solide culture antique pour saisir de quoi il est question, culture autrefois basique mais qui aujourd’hui fait défaut. Entre goût antique & orientalisme, une nouvelle devenue opaque, rendue plus irritante encore par la préciosité du style, qui dérape dans la myrrhe, les soies et l’or. Voilà qui renforce ma décision de ne pas lire Salammbô, convaincu que je suis de ne pas apprécier un tel roman.
Tandis qu’en revanche, « Un coeur simple » m’a donné envie de me replonger dans Madame Bovary, abandonné il y a quelques mois.