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Cela peut sembler dérisoire, mais le fait est que je viens d’écrire pour la première fois de ma vie un article à propos d’un peintre — et que j’en conçois un certain bonheur. Tant il est vrai que ma dernière passion en date (depuis deux ans? Quelque chose comme cela) concerne l’art en général & la peinture en particulier (la majeure partie de mon budget « livres » étant allé durant cette période à la constitution d’une belle bibliothèque d’art).

J’avais déjà approché les arts graphiques dans le cadre de mes « Petits maîtres de la fantasy » (dans la revue Faeries), en rédigeant des essais sur Tove Jansson, Marten Toonder ou Ernest Shepard, mais chacun de ces artistes était également (plus ou moins selon les cas) écrivain, ce qui validait sa présence dans cette rubrique. Pourtant, me démangeait de plus en plus l’envie de me lancer dans des articles sur de purs illustrateurs. Et à lire des papiers sur les peintres, par exemple dans les magazines L’Oeil & Connaissance des Arts qu’Olivier achète chaque mois, l’envie me tenaillait également d’approcher la peinture comme sujet — la question demeurant: comment relier ces envies à mon sujet, la fantasy (la littérature du merveilleux)? C’est en voyant dans un récent catalogue d’exposition (Russes, du Musée de Montmartre) des reproductions d’Ivan Bilibine que je me suis décidé. Bien entendu: voilà un artiste trop peu connu (peu publié dans les pays anglo-saxons il se trouve donc toujours oublié par les commentateurs de la fantasy, qui sont généralement anglais ou américains), mais cependant en plein dans la thématique du merveilleux.

Et de rédiger un article sur Bilibine. Un joli défi (peu de renseignements disponibles) & un vrai petit plaisir d’écriture. La nette impression d’ainsi établir un pont (personnel) entre deux de mes domaines de prédilections: la fantasy et la peinture.

Et puis peinture toujours: je suis retourné faire un tour au Musée des Beaux-arts. Me suis de nouveau extasié devant cette fenêtre de Vuillard (lumineuse & quasiment inachevée); devant les deux Marquet (ces gris translucides & ces cieux brouillés, étonnante impression de lumière nordique); et devant les nombreux Dufy (dont je goûte de plus en plus le trait vibrionnant & les couleurs décalées). Découvert, aussi, les portraits d’Eugène Carrière — obscurs & comme emplis de spectres.

Une heure tout au plus, mais quelle heure: une plongée dans la beauté. En ressortant je vibrais, plein d’une sorte de bonheur pulsant, douillètement. Et me retournant vers la façade majestueuse du musée (dont le rythme régulier domine la place des Terreaux bien plus que le castel étroit de l’hôtel de ville), j’eus la vision de ce que Dufy en aurait fait: voir la réalité à travers le style, la palette, le trait d’un peintre ou d’un illustrateur, c’est là un exercice de ludique observation/subjectivisation du réel qui souvent m’enchante.

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