« Intertextualité — ensemble des relations existant entre un texte (notamment littéraire) et un ou plusieurs autres avec lesquels le lecteur établit des rapprochements »
Cinq jours à Paris, d’une flânerie que j’oserai qualifier d’intense, aussi paradoxal que cela puisse paraître. Qui disait que prendre des vacances c’était changer de fatigue? Anyway: plein les yeux mais plein les pattes, retour à la maison hier. Où la journée fut celle du repos complet — & de la lecture, boulimique, passionnée, d’une traite, d’un pourtant énorme pavé: L’Ère du Dragon par Xavier Mauméjean (chez Mnémos).
Rarement le terme « intertextualité » se sera-t-il aussi bien appliqué à une oeuvre de science-fiction. Ou de fantasy, peu importe les chipotages définitionnels des ayatollahs de la littérature de genre: ce qui importe, c’est la littérature, bien entendu. Et le plaisir de lire — une notion subjective mais profonde qui trouve notamment son origine dans une autre forme de plaisir, celle antérieure au lecteur, de l’écrivain: l’envie de raconter une histoire. De partager une érudition. De s’amuser avec les archétypes. De serrer les fils d’une dense tapisserie.
Et il ne s’agit pas là de quatre méthodes, ou de quatre plaisirs, différents, mais bien d’une seule démarche d’auteur, que Mauméjean conduit avec une évidente jubilation.
Fantasmes d’Albion & littérature populaire se fondent en un colossal roman — où selon la culture de chacun l’on reconnaitra ici Sherlock Holmes, là Tarzan, ou encore un détail de l’histoire de Londres, une enquête d’Hercule Poirot (basculée cul par-dessus tête au détour d’une seule phrase), des pages de l’art russe (Bakst, Diaghilev, mais aussi Malevitch, Prokofiev, Maïakovski et le constructivisme), l’île du docteur Moreau & la Machine à explorer le temps, King Kong & Peter Pan, le Baron rouge & Bob Morane, Fu Manchu & Doc Savage… Un brassage qui fait sens, qui se paye même le culot de bâtir plusieurs niveaux d’intrigues, des mondes qui s’emboîtent & se répondent avec des jeux de miroir internes aussi complexes qu’à l’extérieur résonnent leur intertextualité & leur nature trans-générique.