Il s’agit du manque principal d’une bonne partie de la littérature : l’absence des odeurs. C’est même le signe d’un bon auteur que de songer à porter quelques notes sur senteurs et remugles, en passant, dans un texte, me semble-t-il. Notre société est toute orientée sur l’image, et puis elle est essentiellement urbaine, un environnement où je crois bien que le règne de l’odorat s’estompe — moi-même je ne sens pas grand-chose, en ville, j’ignore mon odorat, ne retenant que, parfois, cette effluve de brûlé de la nuit urbaine, ou bien cette trace d’humidité qui s’exhale de la cave, me rappelant des souvenirs de notre maison familiale en Bretagne.
À la campagne, en revanche, et à plus forte raison par cette chaleur, je suis surpris par l’assaut de tant de parfums. La flagrance des fleurs, bien entendu, mais aussi le fumet de l’herbe, le piquant d’un sous-bois, l’haleine fraîche d’un bosquet, une pointe d’eau… Il manque en ville ces dimensions-là, qu’il faudrait redécouvrir…