A l’entrée du sous-bois, les virgules velues tombées des châtaigniers forment des graffiti sur les larges pages vertes des fougères, dans un alphabet que seuls les moustiques peuvent déchiffrer, peut-être.
Des sentiers étroits comme un seul pas d’homme creusent le terrain crayeux, sinuant dans un paysage dont les bruyères gomment les tourments sous un tapis vert et mauve, bourdonnant et grémilleux. Événements dans cette lande, çà et là se dresse une silhouette verticale, celle d’un petit chêne, d’un châtaignier tordu, d’une bourdaine dentelée de baies rouges, les balais épineux des ajoncs. Une senteur de sable s’élève, quelques digitales oscillent leurs cloches silencieuses. Je ne reconnais plus rien de « mon » camp des Romains, autrefois plus ouvert, les talus s’y lisaient clairement, les affleurements calcaires déchiraient une végétation rugueuse et clairsemée, que le travail des chèvres tenait en respect. L’antique plateau désormais adouci par les bruyères ne se ressemble plus, mes repères ont disparu, ce trou d’eau bordé d’une plage d’herbe trop verte est-il celui où je venais épier dytiques et salamandres? La nature a redessiné ce paysage de mon enfance.