Un ami et collaborateur m’écrit à l’instant, dans un fil de réflexion, que « l’air du temps ne semble plus guère à une littérature trop intellectuellement exigeante », et à discuter avec un jeune collègue hier soir nous constations le niveau médiocre des dialogues dans trop de romans d’imaginaire étiquettés « young adult ». Des réflexions qui n’améliorent pas mon humeur matutinale — influence de la pluie et de ce ciel de nouveau à la grisaille, allez savoir. Et les doutes d’une de mes autrices alimentent ce que je qualifierai d’angoisses existentielles — des vibrations négatives que je ressens depuis maintenant un sacré bout de temps en fait, depuis au moins la fin de l’année antépénultième, c’est dire. Mon confrère de chez l’Arbre vengeur me disait une fois avoir lu dans les mémoires de Robert Laffont évoqué ce « bruit de fond » de l’anxiété de l’éditeur ; j’ai tout de suite su de quoi il parlait. Les doutes, les interrogations, les incertitudes, par moment j’ai l’impression que cela constitue une bonne partie de mon métier. Un sentiment de fragilité, soutenu par quoi ? Quelques chaleurs au cœur, une passion chevillée à l’âme, des collaborateurs précieux, et toujours l’excitation intellectuelle des nouveaux projets, des prochains livres, des manuscrits en cours, des découvertes. Ni déprimé ni pessimiste, pas triste mais souvent tendu : recherchant le soleil.