Ma CDthèque vient de passer chez le coiffeur. Enfin, du moins est-ce l’impression que cela me donne. Je m’explique: au sommet de la CDthèque, qui est large et massive, trônent plusieurs pots de plantes d’appartement. D’ordinaire, lesdites plantes (des misères, un bégonia exotique dont je n’ai jamais su le nom, ce genre de verdure) tombent en mèches et en frisures sur une partie des disques, mais aujourd’hui, le soleil m’a donné envie de faire un peu de jardinage de printemps. Il était grand temps, et maintenant que tout cela est coupé / replanté / nettoyé, soudain tous les CD sont visibles, et même ma petite collection de Nelson, sur le côté.
Oui je sais, c’est passionnant.
Bien entendu, je continue à avancer dans ma lecture des minces volumes du coffret Penguin Lines. J’évoquais en passant, l’autre jour, un écrivain de nature, Richard Mabey, que j’apprécie. Justement, il a lui aussi contribué à cette collection, avec le très attachant A Good Parcel of English Soil, sur la Metropolitan. Une histoire personnelle des banlieues créées par le métro dans les années trente, le « Metro-Land », ainsi que des interactions entre urbanité et ruralité, dans ces zones troubles que sont les banlieues et les zones de friches industrielles. Je commence à presque mieux connaître les noms anglais que français des plantes. Et me réjouis lorsque des références extrêmement british, comme le documentaire Metro-land de John Betjeman, me sont familières. Tout cela m’a remis en tête les extraordinaires balades vertes de mon dernier séjour londonien — je dois dire que cela me frustre considérablement, de savoir qu’un appartement à Londres m’est disponible plus ou moins quand je veux, et de ne pouvoir en profiter, moi qui ne rêvais que de ça depuis des années, parce que je n’ai pas un sou. C’est nul, d’être pauvre.
Je commence The Blue Riband de Peter York, sur la Piccadilly Line, mais ne suis pas sûr d’apprécier. Fort logiquement, Penguin a confié ce volume-ci à un patricien, à l’humour patelin et aux références tellement posh qu’il doit expliquer qui sont les gens qu’il name-drop (Lord Bidule de la société Truc, Sir Machin le boss de chez Chose)… Une vision du Londres du luxe et du pouvoir de l’argent, eh bien, comment? Je ne me sens pas très concerné par ses références non plus qu’en grande sympathie, disons. Et puis, le monsieur écrit assez mal, en particulier il mets en italiques le moindre mot à défaut de savoir exprimer plus implicitement ses mises en valeur, et ça m’agace un brin.
Entre-temps, tout de même aussi, un peu de fiction : le premier polar de Peter Robinson, que je ne me souvenais pas avoir lu, et surtout, un très beau et ambitieux roman de fantasy, le premier d’Anne Fakhouri, Le Clairvoyage. Il est très difficile de totalement réussir un premier roman (je suis bien placé pour le savoir, m’escrimant à essayer d’alléger et d’améliorer un peu le style de mon propre premier roman), à plus forte raison avec autant d’ambition et une influence aussi particulière que le Parlement des fées de John Crowley. Alors Anne part parfois un peu dans tous les sens, il y aurait des petites choses à reprendre, mais qu’importe en fait : voilà une œuvre d’une grande beauté, saisissante, captivante, j’ai été immédiatement envouté. Et ne vais pas tarder à lire la suite.