#2095

Ah mince: j’ai oublié de fêter le dixième anniversaire de mon blog! Comme me l’a récemment rappelé mon webmestre favori, mon premier billet officiel date du 29 juillet 2001… Zut alors, je n’ai plus qu’à attendre le vingtième anniversaire, alors!

Tiens, du coup j’ai regardé un machin que je n’avais que rarement consulté: les statistiques du blog. Merci m’sieur Colin pour être de loin la meilleure « source de trafic » et d’être le premier « site d’origine » à part les recherches Google. Ces dernières ont quelques sujets étonnants: « anif kureishi the buddha »? « hangar en ruine »??

Ah, et en parlant de blog, on vient d’un ouvrir un officiel et tout et tout pour les Moutons électriques: http://blog.moutons-electriques.fr/.

#2094

Sur une idée de mon compère Fabrice, hier jour du patrimoine je suis allé me dégourdir les jambes. Et comme nous sommes tous les deux fils de cheminot, nous avons décidé de tester notre adn sncf: bon, à la gare des Brotteaux il n’y avait rien à voir à part une expo de petits trains, qui ne nous a guère excité, et à la gare de Perrache il n’y avait rien du tout, bonjour le programme des journées du patrimoine… Rien non plus à Château Perrache, idem. Nous étions quand même parvenu à visiter la maison du gouverneur militaire, dans le 6e arrondissement, ça c’était effectivement ouvert comme annoncé. Nous admirâmes donc dûment les ors et miroirs très Second Empire (un beau secrétaire dans la chambre du baron), les écuries (quelle classe, comme on a perdu en standing avec l’avènement du moteur à explosion), les deux ambulances datant de la Première Guerre mondiale… Puis en fin de journée, tout de même, nous prîmes un train spécialement affrété pour convoyer les curieux jusqu’au « technocentre » de La Mouche, le beau et immense bâtiment tout neuf qui sert de garage aux TGV. Là, nous avons constaté que nos gènes cheminots ne sont pas totalement dormants, en nous extasiant devant ces trois trains sur voies surélevées, mécaniques bien visibles. Et puis les pièces détachées, les pentographes, tout ça, tout ça… Bien chouette, comme visite. Pour finir, et en dépit de la pluie qui re-menaçait (mais j’avais pris la précaution de me munir de mon robuste parapluie anglais), nous rentrâmes par les rues du 8e, dont je ne suis guère familier, psychogéographant donc un peu pour clôturer une bonne journée.

#2093

Moment de douce nostalgie: regardé hier soir un très beau film d’Olivier Assayas, L’Heure d’été. Outre que la place qu’y occupent des oeuvres du musée d’Orsay ne pouvait que me séduire, toute cette histoire de maison de famille m’a rappelé de manière lancinante les maisons de mon grand-père, vendues et au moins pour l’une d’entre elles… toujours regrettée. De toute manière, il faut croire que je suis d’humeur mélancolique car je lis du Modiano (oui, j’aime beaucoup Modiano, tendre, mystérieux et psychogéographique).

#2092

Pour être un lecteur boulimique (et peut-être de ce fait?), j’ai des habitudes de lectures très variables. Ma seule constante, en définitive, c’est sans doute la lecture de bédés et de comics. En ce moment je suis très Batman, par exemple. Pour le reste, la prose, vraiment tout est très variable. Plein d’essais, mais les romans ça va ça vient. Au mois d’août, j’ai essayé de me surprendre moi-même… Je veux dire par là: de retrouver le chemin des romans, que j’ai tendance à un peu négliger ; et de lire des choses qui ne seraient pas forcément de mes choix naturels.

Ainsi, comme je faisais un peu de rangement dans mes bibliothèques et descendais des bouquins à la cave (j’y suis régulièrement obligé, afin de ne pas mourir étouffé sous le papier), je me suis dit qu’il serait distrayant d’essayer de relire une saga de fantasy archi-classique — les David Eddings. J’ai donc attaqué la Belgariade, lue et aimée autrefois. Lecture amusante, légère, pas de la haute littérature mais un traitement astucieux de l’ensemble des poncifs post-Tolkien, servi par une langue soutenue. Seulement, après des pages et des pages de péripéties un peu convenues et d’expéditions à rallonge, la suite m’est tombée des mains — le second cycle n’est en effet qu’une redite du premier, ce que l’auteur justifiait de manière très amusante dans la logique interne de son propre univers, ce qui donne à réfléchir de façon intéressante sur la structure de ce type d’univers de « BCF », m’enfin quand même, ça allait bien: hop, les dix volumes sont à la cave.

En même temps, contraste s’il en fut, je lisais Proust. En avançant lentement dans ces phrases touffues et (trop) longues, où l’on passe d’un segment à l’autre d’une hilarante moquerie des salons mondains, avec un point de vue grinçant et cynique, à d’interminable jérémiades de cette chochotte de narrateur, franchement exaspérant dans ses hésitations sans fin. Il y a donc des passages superbes (et quasi impressionnistes, le plus souvent), d’autres fort ennuyeux, des changements de niveau fort curieux, et dans tout cela tout de même plein de belles choses ou de petites curiosités — le tout terriblement daté me semble-t-il, nombre de passages se lisent plus comme un témoignage historique que comme un récit littéraire. Enfin, je continue, quelques pages chaque soir ou presque. Et suis heureux, tant il est vrai que l’état d’esprits « bibliothèque rouge » ne me quitte presque jamais, d’avoir trouvé chez Proust un passage pouvant expliquer certains aspects d’Arsène Lupin, et un autre prouvant (!) que le Comte de Paris et la scandaleuse Mme Swan (l’ex Odette de Crécy) se croisèrent un jour en Ruritanie…

Et puis quoi d’autre? Eh bien, des livres qu’on m’a offert: un Jules Lermina envoyé par Alexandre Mare, qui débute fort bien mais que je n’ai pas encore fini (du vieux roman feuilleton, donc) ; un recueil d’Emmanuel Bove donné par Xavier Mauméjean et dont j’avais déjà lu deux des courts romans. J’avoue n’avoir guère de goût pour cette littérature grise et désenchantée, je retrouve chez Bove la même tristesse que chez Gadenne et Calet que j’avais lus autrefois ; la même très belle langue, aussi, bien sûr, qui m’a tout de même soutenu dans cette lecture ; et puis en fin de recueil un vrai bonheur: Bécon-les-Bruyères, très grinçant portrait d’une banlieue, un vrai texte psychogéographique sur un sujet spécialement dérisoire. Enfin, lu Graal Flibuste de Robert Pinget, que venait de m’offrir Timothée Rey. Un récit d’aventure exotique revu façon Ailleurs de Michaux, pays imaginaires, très étrange texte, poétique, un peu fou et un peu désuet à la fois.

Au programme maintenant: me replonger dans l’Angleterre des années 1920 à 1950, afin de préparer la prochaine biographie de la Bibliothèque rouge, Hercule Poirot, une vie. Mon co-auteur Xavier Mauméjean y travaille déjà depuis un moment et a fait un nombre étonnant et réjouissant de découvertes. Rédaction prévue pour janvier, d’ici là je dois me replonger dans ces époques, dans des tas d’essais — et aussi dans quelques romans évoquant le Blitz, en particulier. Auparavant, je viens de lire une vieille mais excellente histoire de l’impressionnisme (John Rewald, 1955) pour étudier la manière de construire certains futurs volumes de la collection, auxquels je cogite actuellement (une nouvelle manière de développer notre concept). Par conséquent, cette immersion dans une autre époque ne sera pas un dépaysement, simplement le prolongement d’un de mes modes favoris de travail.