Dormir devrait être une activité agréable, mais en réalité elle est chez moi souvent perturbée, par les nervosités du moment, ou bien comme cette nuit par la touffeur du climat. Somnolant, je me suis mis à penser à un drôle de truc. De nos jours, Gaston Lagaffe serait âgé d’entre 65 et 70 ans. Et voguant entre deux eaux oniriques, j’imaginais fort bien à quoi ressemble Gaston vieux, un peu voûté, une couronne de cheveux blancs, toujours le même gentil excentrique que dans les années 70, cultivant son jardin (il aura certainement hérité du petit pavillon de sa tante Hortense), bidouillant ses inventions, le toit de sa maison couvert de panneaux solaires de traviole. Toujours écolo-gauchiste, le vieux Gaston, du genre à tenir un blogue comme celui de Jean-Louis Fraysse. Et Jeanne Lagaffe, son épouse, toute menue, les cheveux gris tirés en chignon, faisant le ménage, regardant avec adoration son grand fou de mari. Et le copain Jules, à la retraite de chez Smith-en-face, chauve comme un oeuf, son large sourire s’ouvrant sur une dentition clairsemée. Oué, je les imagine clairement, ces retraités là.
Ensuite j’ai dormi un peu, by fits and starts, mes songes je crois sont devenus « ligne claire », je me souviens vaguement de quelque chose sur Des Esseintes, ou bien sur Bel-ami, je ne sais plus (j’ai relu les deux ces derniers temps, quand je n’étais pas dans Proust), mais dessiné par quelqu’un comme Stanislas (avez-vous lu son Perroquet des Batignoles? Du feuilleton absolument parfait, un régal). Bon je sais, j’suis bizarre.