#2157

Il y avait une expo sur Terence Conran (le créateur d’Habitat), au musée du design. J’y ai appris deux choses sur ledit musée, d’ailleurs: primo que ce joli petit bâtiment moderniste est un fake — il ne date nullement des années de gloire du modernisme, avant le musée se tenait là un entrepôt noirâtre destiné au murissement des bananes! Et qu’il va bientôt déménager (en 2014) pour l’ancien Commonwealth Institute, sur High Street Kensington. Je suppose qu’à cette occasion la collection permanente sera de nouveau exposée, ce qui manque depuis des années. Bref, à cette occasion en tout cas j’ai une fois encore constaté combien la mode, en design, était à un revival de l’esthétique 60-70. Et le merchandising du musée comme de la Tate Modern le prouve aussi, en ce moment. Je dois dire que j’adore ça, le design 60-70. Tiens, par exemple l’excellente cafétéria thaï où nous avons été déjeuner à Reading était complètement dans cette mode Seventies, et ça me ravit, ce retour esthétique a quelque chose d’assez stupéfiant. Mais… comment fera-t-on, plus tard, pour effectuer un revival 2010, alors?

#2156

D’après cet article, la Poste viendrait d’être condamnée à payer une amende d’un million d’euros par l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep), parce que depuis 2007 (il était temps de se réveiller!) il n’y a plus de service de petits colis ordinaires.

Mais elle me fait bien ricaner, l’Arcep, pourquoi n’ont-ils pas réagi plus tôt, alors que depuis quatre ans les clients de la Poste sont arnaqués par les « colissimo », service ni garanti ni remboursé et hors de prix? Et encore, quand au guichet on ne convainc pas les clients de débourser pour un recommandé (que le postier n’apporte pas à domicile, préférant la pratique de la prétendue « absence » du destinataire) ou pour un chronopost (deux fois des documents bien entendu d’une extrême urgence pour les Moutons n’ont pas été livrés — et le service non remboursé, malgré mes réclamations).

Et quid de l’obligation de service universel sur les lettres, qui doivent arriver le lendemain — ce qui n’advient guère? Et qui va payer ladite amende, finalement, et cela convaincra-t-il la Poste de rétablir un service de petits colis ordinaires? La Poste est coincée entre la logique de privatisation des gouvernements libéraux, la sale mentalité défaitiste et démotivée de ses employés, et la prétendue obligation de service universelle, qu’elle méprise. Tirée à hue et à dia, elle dysfonctionne en permanence et cette situation a structurellement mis en place des mécanismes néfastes: avis de passage anti-datés, destinataires prétendument introuvables (des courriers en réalité non distribués et retournés à l’expéditeur), destinataires prétendument « absents » (l’autre jour j’ai eu des livraisons d’Exapaq, de DHL et d’UPS… et un avis de passage pour « absence » de la Poste), colissimos qui fut un temps étaient soit-disant garantis en 48h et qui n’arrivaient que rarement dans les temps (maintenant ils ne sont plus du tout garantis, mais toujours aussi coûteux), suivis erratiques (site en ligne non renseigné ou erroné, zappage avant livraison réelle, etc.). Tout un appareil de trucages quotidiens, et ne parlons même pas des colis volés ou abîmés, ou des guichetiers malotrus et incompétents.

En tant qu’éditeur vendant un peu par correspondance, les Moutons électriques sont en but constamment à toutes ces vilainies, et doivent notamment se battre pour obtenir d’envoyer les livres en France au tarif « lettre » (puisque les lettres sont censées être uniquement des documents et que les livres sont bien des documents), et à l’étranger au tarif « livres & brochures » (dont la Poste se garde bien d’informer ses clients, et même ses guichetiers, vu comme il est avantageux).

Traiter avec la Poste, c’est Brazil tous les jours.

#2155

Retour de cinq jours à Londres. Passablement épuisé — j’ai marché comme jamais, mais bien bossé: mis au point deux promenades spécifiques, pour un Bibliothèque rouge sur Londres que je vais diriger l’an prochain (un parcours de Lénine à Rimbaud et un parcours de Holmes à Poirot). C’était bien.

#2154

Bouclage d’un tas de petits trucs et un peu de rangement aussi, histoire d’avoir la « conscience tranquille » en partant pour quelques jours de vacances, à Londres (c’est mon cadeau de Noël). Des vacances aux aguets, tout de même: je pars avec dans ma besace quelques adresses afin de faire des repérages et photos pour ce Hercule Poirot, une vie auquel je bosse avec Mauméjean. Je viens de rendre au commercial les épreuves pour Bon à Tirer du Steve Ditko, je vais donner le Bon à Façonner de la rééd Le May à la Maison d’Ailleurs (avec quelques vieux manuscrits), France Culture a téléphoné ce matin (pour le « Mauvais genres » du 31), un devis vient d’arriver, Le Majeur – Badabing n°2 du jeune Axel sera livré ici le 21 (j’y ai un petit article sur la psychogéographie de Londres, justement)… Mais ça sent les vacances. Un peu.

#2149

Curieux paradoxe qu’au moment même où l’on nous annonce la mort du livre en papier (annonce ma foi qui me paraît fort crédible lorsque je consulte les chiffres de vente), soit né aux États-Unis un mouvement de rééditions luxueuses et ultra soignées, sous la forme d’intégrales en hardcover, du patrimoine des comic strips. Je crois avoir déjà exprimé ici mon délice de lire en grand et beau et complet format les Rip Kirby d’Alex Raymond, par exemple, ou les King Aroo de Jack Kent. Les deux firmes IDW et Fantagraphics font dans le domaine du strip un travail extraordinaire. Et voici que je reçois le premier volume des Pogo de Walt Kelly. Mon bonheur est complet: chaque dessin, le moindre crobard de Kelly, est un pur délice pour l’oeil. Depuis des années, j’achète de temps en temps des Pogo jamais complets, en divers formats, j’ai même dans un carton le « Gag de poche » Dupuis autrefois traduit/adapté par Yvan Delporte. Mais là, ah! C’est le bonheur, je ne trouve pas d’autre mot.

Et vu l’épaisseur du volume, je ne suis pas prêt de le ranger, je crois, le temps de tout lire — ce qui est aussi bien, car franchement je n’ai plus du tout d’espace chez moi pour les bédés, ce qui ne manque pas de m’ennuyer vu le nombre que j’achète. Hum, voyons voir, il y aura en tout 12 volumes des Pogo… ça va faire près de 40 cm d’étagère! Ouch. Et moi qui n’arrête pas d’acheter des bédés, c’est affreux. Mon goût pour Walt Kelly provient en partie de la séduction qu’exerce sur moi tout le domaine de la BD animalière (et non, crétin de ministre, Babar n’a jamais été une bédé). L’autre jour l’ami JPJ, connaissant ma faiblesse, m’a d’ailleurs conseillé deux albums anglais de la collection « DFC Library » (des bédés dans le format français, publiées outre-Manche par un petit éditeur pour la jeunesse). J’ai déjà lu Super Animal Adventure Squad, hilarant de bêtise et d’absurdité, et je vais me plonger dans le dessin à la fois clair, précis et surchargé de Baggage des Etherington Brothers. Franchement, c’est le genre de créations que Dupuis devrait publier, plutôt que la minable soleillerie Zarla que je subis actuellement dans les pages de Spirou

Ah, et puis j’ai adoré 10 petits insectes dans le brouillard, de Cali & Pianina chez Sarbacane. J’avais été attiré par la couverture, le dessin et les couleurs sont très étranges, la narration gentiment absurde, c’est fascinant. En rangeant vaguement ma bibliothèque de bédé, l’autre week-end, je constatais d’ailleurs avec effroi que la disparition de la maison Carabas m’avait privé de certaines de mes séries favorites de ces dernières années: Arbreville d’Éric Sagot, Georges Frog de Phicil & Drac, Nébulo de Zébé… Encore des oeuvres, d’ailleurs, que j’aurai bien vu chez Dupuis, vu les traditions graphiques auxquelles elles se rattachent. Tout fout le camp, mon bon monsieur.

10 Petits Insectes dans le Brouillard -bande annonce- from Philippe Valette on Vimeo.