Beautiful, Paris (1)
Cela a commencé par un bistro bien parisien, les vitres ourlées de givre, le plaisant serveur en gilet noir, l’art-déco fanné tout en orange et brun. Raconter un voyage, si bref soit-il, cela ne devrait-il pas être aisé? Un point de départ, un trajet linéaire, une arrivée. Mais rien n’est simple, tout se complique, pour citer Sempé: les souvenirs flous, les points saillants du plaisir et de la flânerie, les moments de fatigue, l’étouffement des trajets en métro, l’ennui d ‘une rencontre engoncée avec un type qu’on n’aime pas, le bonheur au contraire de se trouver avec ceux qu’on aime, des tableaux, tant de tableaux, le béton calme du Palais de Tokyo, les feuilles rouges et jaunes craquant sur le sol, l’eau brillante du canal, la respiration d’une marche, le froid cinglant, tout se mêle et quelques jours après, comment raconter?
Alors commencer par le premier repas, juste en arrivant gare de Lyon. Ligne 1 direction les Tuileries puis le choix un peu au hasard d’une carte où le mot « goulash » me met l’eau à la bouche. Comme un avant-goût de l’exposition qu’on l’on va voir, sur les Russes. Une potée rouge et odorante, au fumet de vacances. Au-dehors, mon cousin Melvil ne frissonne même pas, en dépit du froid hivernal. Il est nu sur tous les murs de la capitale, pour l’affiche de son dernier film.