Le roman américain est terriblement trendy, hypra branché. C’est le nouvel arbitraire de la culture dominante, dirait l’universitaire dont j’ai parcouru un papier hier soir. On découvre enfin Richard Powers ou Jonathan Lethem, des années après que je les ai lus (j’avais même conseillé à un éditeur de publier du Powers, mais il n’en fit rien). Et tandis que tout les intellos, de mon copain libraire Cissé à mon tonton Jean en passant par Fabrice Colin, par exemple, se gargarisent de la littérature américaine contemporaine, eh bien, les hasards de mes envies et de mes recherches font que moi je n’en lis plus tellement… Mais je prends grand plaisir à recevoir, chaque mois, une revue culturelle ô combien américaine: The Believer. C’est publié chez l’épatant éditeur McSweeney’s, et c’est assez étonnant, chaque sommaire est inattendu. On a publié dans le dixième Fiction un petit article qui en venait, d’ailleurs. Et là, ce mois-ci, je me suis délecté d’un long papier sur un copain de Brautigan, Don Carpenter, et d’un autre sur un duo de mythologues japonais de 1908 ! Je me demande même si on ne pourrait pas le traduire pour la nouvelle mouture du Panorama, celui-ci. Seulement un article médiocre, ai-je trouvé: un entretien de Francis Ford Coppola avec une copine à lui, critique gastronomique, où ils papotent des bouffes qu’ils ont faites et des recettes qu’ils aiment. Uber-snob et passablement ridicule.
Archives mensuelles : janvier 2010
#1809
Un ami vient de m’en raconter une bien bonne: il avait offert Zombies! à l’un des animateurs du gratuit culturel lyonnais Mercure liquide, qui le lisait l’autre soir dans le métro. En face de lui était assise une jeune goth. Arrive un arrêt, la fille se lève et lui arrache le bouquin, s’enfuie avec! Je savais que ce bouquin commençait à être sérieusement « culte » auprès du public goth et Cie, mais alors là, si on se l’arrache, c’est encore mieux…
#1808
De même que j’aime beaucoup les versions illustrées de livres, j’aime également les adaptations filmiques — qui fonctionnent pour moi moins comme des oeuvres autonomes (alors que la critique à tendance à ne parler que du film, comme s’il ne s’agissait pas juste de l’ombre portée par un roman) que comme des illustrations — des illustrations qui bougent. Et ainsi, j’aime beaucoup regarder des versions différentes de certains de mes romans favoris: les Jane Austen, bien sûr, que la BBC ne cesse de retourner et re-retourner (j’ai un nouvel Emma à voir), mais aussi Retour à Brideshead d’Evelyn Waugh, dont j’avais vu l’adaptation télé il n’y a pas très longtemps, très belle, et dont j’ai regardé hier soir la version ciné — superbe aussi, et intéressante dans la manière dont elle reconstruit l’exposé de l’intrigue. L’intelligence et la droiture de Charles Ryder, le tragique destin de Sebastian Flyte, la sensualité, le quant-à-soi britannique, la beauté de Venise, la perversion catholique, tout est admirablement rendu, animé, et jusqu’à la musique qui concoure à restituer l’ambiance de cette histoire fascinante.
#1807
Pour rester dans les Seventies: dans la série Life on Mars, dont j’ai regardé avec pas mal de fascination les deux premiers épisodes, j’étais un peu étonné de l’absence totale d’une démarche de police scientifique, ne serait-ce que faire gaffe aux empreintes (pour ceux qui ne connaissent pas, il s’agit d’une série anglaise où un flic du Manchester de maintenant se retrouve brutalement projeté dans les années 1970). Ç’aurait pu aller avec l’aspect quasi onirique de cette série, ses décalages étranges, mais en fait j’ai revu hier soir l’un de mes films cultes, datant de 1975, et ce n’est pas mieux, lors de l’enquête au début c’est du n’importe quoi niveau procédure… Le passé est un pays étranger, disait L. P. Hartley — et les Seventies sont d’autant plus « étranges » que ce ne sont que les détails qui étonnent. Si loin, si proche, tout ça. Le film, c’est Le Chat et la souris de Lelouch (oui Patrick, tu peux hurler), que j’adore de longue date. Un polar bizarre en diable, limite Nouvelle vague, avec Michèle Morgan et Serge Reggiani absolument brillants.



