Je n’entretiens vraiment aucune nostalgie vis-à-vis des premiers albums de Marillion, ne supportant plus, de longue date, la voix de la premier chanteur — je me souviens que lors d’un concert de « Misplaced Childhood », leur troisième album, j’avais été déçu de ne plus tellement aimer, déjà —, si ce n’est celle des souvenirs de la découverte de ce groupe, en compagnie de Michel Pagel ou de Philippe Caille par exemple. Mais c’est du passé et si je suis devenu un grand fan de Marillion, c’est ensuite, depuis l’arrivée de leur chanteur, Steve Hogart, l’immense Steve h. Lui, c’est clair que je suis accro à sa voix. Et puis réentendre les anciennes compos du groupe révèle à quel point elles étaient faiblardes, pas très bien fichues et de sonorités pauvres — de nos jour, même les chansons les plus simples du groupe bénéficient de sons de guitare et de nappes d’effets sonores du claviériste qui sont d’une formidable subtilité, d’une grande beauté.
Pour autant, hier soir au concert lyonnais, qu’ils nous rejouent trois morceaux anciens fut une jolie surprise, une madeleine délicieuse, des moments de complicité au sein d’un récital d’une qualité peu souvent égalée — et j’en ai vu, des concerts de Marillion, pourtant. Je ne vais pas souvent à des concerts : aimant le jazz-rock et le progressive, d’évidence, les concerts n’en courent pas les rues (et ce d’autant que je n’apprécie ni le « prog métal », pour moi une bien pauvre hérésie, non plus que le « néo-prog »). C’est donc une séquence rare et exceptionnelle pour moi qu’un concert comme celui d’hier soir, avec en première partie Aziz Ibrahim, aux flots sonores entre Mahavishnu et Djam Karet, puis un Marillion d’une énergie, d’un équilibre et d’un charme réjouissants. Et quoique, entre nous, l’image de Lyon colporté dans l’un des vieux morceaux — une pute murmurant « j’entends ton coeur » — ne m’a jamais semblé d’un bon goût achevé, je ne fus pas le dernier à m’époumoner sur J’entends ton cœur/I can hear your heart. Étrange potion qu’un concert rock, on flotte, on se laisse porter dans la musique, dans une expérience d’écoute et de participation qui en fait un moment à part de la vie ordinaire. Belle nuit.