#2673

Ce week-end je n’ai pas fait de vide-greniers, je n’ai même pas été regarder dans la boîte à livre, mais pourtant je suis plus riche de trois livres — et même, je les ai déjà lus, ou pas loin, du fait notamment d’une nouvelle et fort large insomnie. Loués soient les amis qui savent bien que l’on n’a jamais trop de bouquins, et qui donc m’ont offert ceux-là. D’abord un gros et grand et beau recueil ancien (sans date) de dessins d’Audrey Beardsley — je n’ai jamais bien su si j’aimais ou pas Beardsley, ce qui explique que je n’avais toujours pas de recueil de lui sur mes étagères d’art. Et de fait, je ne le sais toujours pas réellement, mais disons que si ses dessins les plus dépouillés ne me parlent guère, et encore, c’est variable, ses compos hyper chargées me ravissent l’œil de façon un peu perverse.
 
Ensuite, un auteur ami m’a offert son petit dernier après une halte dans l’écriture : Des sorciers et des hommes, c’est du Thomas Geha, ça sort ce mois-ci chez Critic et c’est une impeccable fiction de genre, ancrée sans vergogne dans le « golden age » de la fantasy, plus exactement en hommage à Fritz Leiber, sans rien de kitsch en dehors de l’illus de couv, sans rien de forcé non plus, c’est malin et gouleyant et réellement satisfaisant, en tout cas pour moi qui ai cette culture spécifique.
 
Enfin, un copain de passage qui m’offre un cadeau d’anniversaire aussi hors date qu’apprécié, sous la forme d’un petit recueil d’articles de Nick Hornby, More Baths Less Talking, réunissant la cuvée 2010-2011 de ses chroniques de lecture pour The Believer. J’ai été abonné quelques années à cette revue américaine, pour mon fils en fait, j’y picorais avec délice mais parcimonie, et je retrouve intacte la verve enjouée, la fausse candeur et la véritable acuité intellectuelle d’Hornby, qui pourtant évoque surtout des livres que je n’aurai pas envie de lire, mais il le fait de manière prenante, lumineuse, ses lectures nous enrichissent et ses remarques nous éclairent. Et pourtant, ce mec est fan de football.

#2672

Il m’amuse de prendre de manière assez régulière une photo de la pile de livres lus récemment, mais ce n’est pas si simple : outre qu’il s’ajoute à mes lectures pas mal de numérique, me souvenir à quinze jours ou trois semaines de tout ce que j’ai lu et (donc) déjà rangé ne s’avère pas toujours exhaustif. Enfin, pour le principe, voici un aperçu ce que j’ai englouti ces dernières semaines…

#2670

Je ne sais jamais si je dois m’amuser ou m’attrister de cette espèce de culte du maussade qui règne sur la littérature « blanche » en France. Entre telle librairie « sérieuse » dont l’intérieur est pénombreux au point que le manque de lumière me tire sur les yeux les rares fois où j’y vais, et cet auteur de chez Finitude qui l’autre jour commençait à raconter son roman et s’interrompit soudain pour nous assurer qu’il ne s’agissait pas d’un roman « feel good » — ah ah ah, eh bien OK alors garde-le, ton roman pas « feel good » mon gars… À croire que pour cet establishment français qui dit « blanche » dit forcément « triste », quelle misère franchement que cette idéologie du sérieux-chiant. Ça en devient ridicule : je lis en anglais un Salman Rushdie, dont le texte de 4e de couv chez Vintage laisserait presque à penser qu’il s’agit de fantasy urbaine, tandis que le 4e chez Actes Sud est du lugubre de rigueur chez nous ; et un roman traduit du suédois, que j’ai en anglais (je ne sais plus l’auteur, flemme de chercher sur les étagères), annoncé comme plein d’humour tandis que le petit éditeur français l’ayant publié évoque sa mélancolie ! Ne l’ayant pas encore lu je ne sais laquelle de ces deux 4e reflète correctement le texte, mais un tel écart, ça devient un peu caricatural. La littérature peut être lumineuse sans manquer de sérieux, tout de même, eh.