#2010

« Tous les jours sont ici des dimanches ; sur le retour, on n’a croisé d’âme qui vive que l’une des profuses vieilles dames du clan des nantis, elle tient en laisse un chien anecdotique, lequel nostalgiquement défèque un bref étron ovale comme un mégot de cigare — on s’étonne qu’il ne soit pas bagué. » (Pierre Marcelle, Articles de Paris)

#2009

Je ne saurai en donner le nom, n’étant pas parvenu à le lire sur les plaques bleu émail de la gare, au passage de mon train pour la Savoie. Sur le bout de quai en face, un jeune couple poireaute en riant. Ils sont peut-être heureux de quitter ce lieu: une petite ville coincée dans une crevasse. Tout ses immeubles sont de grande taille, il n’y a guère de terrain donc ils ont poussé en hauteur, comme s’il y avait tant de monde pour s’entasser là. Même le gris clocher semble plus aigu qu’ordinaire. Et bien que le ciel soit bleu, la température clémente, oh que tout cela parait triste, transi de froid. Pas un bâtiment qui ne soit vieux, usé, rapiècé: l’architecte de cet endroit semble être Foester. Ce n’est pas une ville, c’est un cadavre de ville, tombée pour ne plus se relever. De vieux ossements urbains dans un recoin de montagne.

#2008

Voyage express en Normandie, en compagnie parentale. Fort heureusement il y a un TGV direct pour Le Havre. Juste avant Massy un convoi de chars, immobile dans le jour déclinant, d’une blancheur de vieil os. Journée chargée mais exaltante : matin à Étretat, la craie, le plateau herbu, enfin voir l’Aiguille creuse d’Arsène Lupin de mes propres yeux ; bref escale à Bénouville, village près duquel vivait Clarisse d’Étigues, la première épouse du gentleman-cambrioleur, église pointue ; puis déjeuner et promenade à Fécamp, avant de regagner Le Havre — après la beauté naturelle des falaises d’Étretat, c’est là un choc esthétique d’un tout autre ordre, celui de l’architecture humaine en majesté. Austérité rectiligne de la ville conçue par Auguste Perret, avec laquelle contraste la douce rondeur du double bâtiment conçu par Oscar Niemeyer, et enfin l’éblouissement de l’église St-Joseph, aussi martiale à l’extérieure (j’ai cru voir à son sommet le globe du Daily Planet…) qu’elle est incroyablement légère et lumineuse à l’intérieur. Fortes émotions esthétiques, vraiment.

 

 

 

#2007

Écrit un chapitre sur Atget, Fargue et Carco. Ajouté un chapitre (par Olivier Bailly) sur Yonnet, Giraud et Clébert. Le chantier « psychogéographie » progresse à grands pas. Nous sommes bien loin de la SF, me direz-vous? Faux: Patrick Marcel va parler de Notre-Dame des Ténèbres de Leiber, roman psychogéographique s’il en fut ; et moi de quelques petits chefs-d’oeuvre californiens non traduits. Sous les pavés, la science-fiction. Sinon, je pars ce soir au Havre, pour un bref passage en cette ville et à Étretat (documentation Lupin oblige).

#2006

Étant donné mon travail actuel de traduction de l’ouvrage de Merlin Coverley, j’ai la tête à la psychogéographie, mais tout de même, on croirait que c’est fait exprès: je devais me rendre ce matin dans les locaux du magazine Lyon Capital afin d’y être interviewé sur la « Miroir – BD » pour un podcast. J’y suis allé et — wow, ce coin paumé! Dans Vaise, sous l’autoroute (mais vraiment sous l’autoroute), des ruelles qui serpentent entre route et chemin de fer, des pruniers en fleur, un ancien monastère transformé en HLM, des bicoques et des hangars… Un pur lieu de promenade psychogéographique. Un vrai « junkspace ». Il faudra que j’y retourne quand j’aurai du temps et qu’il fera un peu plus beau.