Curieux comment les choses fonctionnent, parfois : je ruminais depuis quelques temps sur un sujet, et un ami m’écrit ce matin « Mon grand regret est d’avoir laissé cette relation se distendre, la distance n’excuse pas tout. :-/ Jeune et bête… » Oui, jeune et bête, c’est exactement ce que je me disais à l’instant, en réfléchissant je ne sais pas trop pourquoi (si, une scène dans le dernier Baxter-Pratchett) à des relations que j’ai laissé tomber autrefois, lorsque j’étais jeune. Parfois bien sûr, la distance excuse, justement : la relation ténue que j’avais avec certaines camarades du lycée, à Limoges, avec une correspondance qui diminua vite… Ou celle avec Françoise, était-ce seulement son prénom? Cette fille plus âgée que moi avec qui j’avais noué une curieuse amitié à Bordeaux… Chacun file vivre sa vie, sans trop regarder en arrière. Il en passe, des gens, dans une existence ; on en croise, tant et tant, des personnes que pour une raison ou une autre l’on ne suit pas, plus. Et je ne parle pas là de ceux qui meurent, mais bien de ceux que l’on perd de vue, parce que l’on ne peut embrasser tout le monde. Devenu vieux, je m’y efforce un peu mieux, pourtant. Mais étant jeune… En me retournant vers mon départ de Cergy-Pontoise, cette déchirure terrible lorsque j’avais tout juste 18 ans, je me demande comment j’ai pu quitter E. et P. si aisément, sans plus jamais un mot. Je l’ai payé, une fois arrivé à Limoges, d’une sévère dépression, mais sur le coup on s’est dit au revoir, c’est tout, alors que c’était un adieu. La jeunesse se croit éternelle, c’est un cliché mais tellement vrai, c’est même presque un archétype : la jeunesse éternelle — et puis un jour on se regarde dans le miroir du couloir, on se découvre des poignées d’amour, on réalise que l’on a 40 ans, on se découvre déjà vieux. Et il est trop tard pour renouer avec certains, le passé est un pays aussi étranger que lointain.