#5150

Décembre. Fourbu d’une journée de relecture de maquettes avec mon équipe, pas le goût à lire (ciel !) mais plutôt à me dégourdir les jambes. Un bref tour du quartier, admirer la fée électricité jouant sur fond de nuit humide, humer la senteur de fumée urbaine, songer à Maigret et Gil Jourdan. Clopin clopant sur la chaussée luisante.

#5149

Décembre. Balayer l’épaisse moquette grise des feuilles mortes, sur la terrasse, déposée par le micocoulier comme la température descendait sous le zéro. Écouter les bruits noueux des branches et de la bise. Les rues de Malakoff, l’autre jour, s’emplissaient des criailleries des corbeaux. L’air crispé de froid coule sur le quotidien affairé, juste avant la halte des dimanches obligatoires. Il y a une telle pesanteur des fêtes, presque écœurante, dodelinante, un peu bête. Une fièvre molle, grommelle-t-il.

#5148

Rentré hier soir à pied du centre-ville faute de bus, et ce fut une expérience agréable après ces longs mois de boitillement douloureux. Je me suis cassé un talon un peu avant l’été et ce tracas persiste encore, mais va en se réparant lentement. Lent fut également mon chemin par le cours de la Somme — mon avenue favorite de Bordeaux pour plusieurs raisons personnelles, et un changement bienvenu de trajet. Le froid piquant cessa vite de me gêner, sans doute à l’aide du gros paquet de frites pris dans un kebab près de la Victoire, et la nuit tranquille, rouge et noire sous les lampadaires, déroulait ses étincelles, ses parts d’ombre et ses longues perspectives obscures dans le calme relatif de la rumeur urbaine.

#5146

Retour. Levant les yeux de ma lecture, je découvre un paysage blanc et plat, toutes couleurs assourdies, sous un ciel strié de bandes pales. Sur les champs givrés seules les éoliennes placent quelques verticales. La neige tavèle encore la terre et la brume gomme l’horizon.