Yeux qui piquent, ville dans le brouillard, jour pâle qui se lève… Départ pour le lointain Tarn afin d’aller rechercher un carton de manuscrits de Wagner chez m’sieur Pagel… Que ne ferait-on pas pour la cause de la littérature, grommela-t-il… Agen vient de passer, brève étendue de tuiles roses après une plate campagne morcelée de haies et de futaies, largement happée par la brume… Verdure brillante et lourds rideaux gris…
Archives de l’auteur : A.-F. Ruaud
#4048
Brouillé de lassitude mais content malgré tout, je viens de boucler la recherche / scannage / commentaire de l’iconographie du beau livre sur Arsène Lupin qui sortira en avril, relu et retouché le texte, voilà, ça c’est fait murmura-t-il dans un dernier râle. Tête lourde et léger vertige, nuque douloureuse, je me pose un moment au jardin pour faire comme la tourterelle gris rosée sur son antenne : écouter les oiseaux, laisser trembler les feuilles et regarder les nuages voguer dans le bleu. La merlette gratte sous le figuier, sans que la dérangent mes fort peu chasseresses minettes.
#4047
La dernière fois que je suis allé à Lausanne j’ai réalisé avec un pincement de cœur que selon toute évidence je voyais ce copain pour la dernière fois – mais je n’avais pas réalisé que je ne retournerai peut-être même pas à Lausanne, cette drôle de ville mal fichue que j’aime beaucoup. La dernière fois que je suis allé à Londres j’ai réalisé que je connaissais tant cette ville que je devais aller en visiter d’autres et laisser un peu de temps s’écouler avant de revenir sur les rives de la Tamise – mais je n’avais pas imaginé qu’entre un Brexit et une pandémie, de toute manière je n’aurai pas le choix, et vraiment j’ignore encore quand j’y retournerai. Pour Montréal c’est différent : j’ai hélas renoncé à me rendre à la World Fantasy Convention où je suis invité début novembre, parce que d’évidence mon état de santé me l’interdirait. Ouais faite pas gaffe, un peu de vague à l’âme.
#4046
Un bel automne brille sur ce bord de Gironde et il n’y a qu’à une telle saison que l’orange devient, dans le ciel, comme une nuance sous-jacente du bleu. Je n’en profite pas encore pleinement, jambes lourdes de fatigue, démarche un peu titubante, siestes nécessaires, lenteur si irritante… mais me suis tout de même rendu ce matin à la brocante Saint-Michel et au marché des Capucins. Quelques trouvailles à la première : des Tartine, de vieux NRF, un Noël Vindry de derrière les fagots pas même coupé… Je suis déjà bien accoutumé à mes nouvelles lunettes et peux de nouveau lire sur papier (fini deux romans), me manque encore la paire qui me permettra d’accéder sans nausée à l’ordinateur – ce sera mardi. Convalescence.
#4045
Ce midi j’ai fait avec mon ami Fabrice ce que nous voulions faire depuis longtemps : déjeuner chez madame Maigret. Ce petit bistrot de la rive droite a ouvert le 1er octobre 1955 et est toujours « dans son jus », même patronne et sans changement : déco fifties et Formica partout. Un véritable voyage dans le temps, avec petit blanc et journal sur le comptoir. Délicieux moment Simenon.
