#2645

À propos de monsieur Poirot, juste un détail, un souvenir que je peux vous confier : nous avions presque terminé de rédiger cette nouvelle version de sa biographie, Mauméjean et moi, lorsque je réalisai que nous avions omis quelque chose de pourtant assez important : l’on savait que Poirot, en bon Belge de son époque, était croyant, forcément catholique. Comment imaginer qu’il n’allait pas à la messe, alors ? Non qu’Agatha Christie ait jamais évoqué cela, mais soudain il me sembla qu’il s’agissait d’une évidence, d’un trait de caractère intime qui ne pouvait être inséré dans un roman policier mais devait faire partie de l’existence quotidienne de notre cher détective.

Comme nous l’écrirons alors : « Nulle part dans les textes il n’est fait la moindre allusion au fait que Poirot se rende dans une église. Mais, à cette époque, il s’agissait encore d’une démarche assez commune, fort peu sujette à commentaires spécifiques. La foi de Poirot relevant du domaine intime et n’ayant pas de lien avec ses enquêtes, ses biographes n’ont pas jugé utile de nous donner des indices sur sa fréquentation ou non d’un lieu de culte. »

Mais enfin, l’évidence me frappe, Hercule Poirot ne se rend-il pas parfois à la messe ? Je cherche sur des cartes : les églises catholiques ne sont vraiment pas nombreuses à Londres. Ah, en voici une pas très loin de Covent Garden… Oh mais non, encore mieux, attendez… Il y en a une au bout de Charterhouse Street, la rue qui conduit à l’immeuble d’Hercule Poirot sur Charterhouse Square ! La réalité nous fait de ces cadeaux : l’église de St Etheldreda, l’une des plus vieilles d’Angleterre, sur Ely Place. Une église catholique, la seule de tout ce secteur. Voilà : impossible d’imaginer qu’il ne s’agisse pas de l’église où monsieur Poirot alla de temps en temps à la messe.

Ainsi se conduit la biographie d’une grande figure mythique des littératures populaires : sous la forme d’une enquête.

#2644

Tiens, je sors un petit peu de chez moi, la semaine prochaine : rencontre avec des bibliothécaires dans la riante ville de Niort le 8 (en compagnie de gentils camarades de chez Mirobole et Monsieur Toussaint Louverture) et blabla avec des amis en banlieue bordelaise le 9 (Patrick Marcel et Laurent Queyssi, à la médiathèque de Villenave d’Ornon, 18h).

#2642

Hier mon chef de fab est venu me rendre visite au bureau, les bras chargés de cadeaux — des tas d’échantillons de fabrication intéressante + un hilarant bouquin avec des licornes à paillettes… Et puis, pile au moment où il arrivait, une camionnette est venue s’arrêter devant notre porte, qui nous livrait ceci dans un gros nid de kraft — et je crois bien que je ne suis toujours pas un rude éditeur cynique et blasé, car j’en suis franchement, vraiment, très ému. Les premiers résultats d’un travail de longue haleine, énorme et collectif, en fait, une vraie aventure éditoriale, et… j’suis content, quoi. Ils sortent en librairie en avril. Lancement à la librairie Le Nuage vert à Paris le 5 mai et chez Critic à Rennes le 12 mai, en attendant d’autres dates…

#2641

Hier j’ai profité de la lumière et du bleu du ciel pour aller me promener dans un coin de banlieue proche, plus spécifiquement afin d’aller voir le bout de parc qui s’étend au sein des grands ensembles de Talence, non loin du boulevard. Outre ma fascination pour le foutoir urbain qu’est la banlieue, j’étais curieux de marcher dans ce grand espace vert porté sur la carte. Une légère brume adoucissait les vallonnements entre les arbres, des fleurs blanches flottaient comme des étoiles sur les branches indistinctes et dans l’air humide résonnaient les cris de deux enfants, à l’autre bout du terrain, étonnamment forts dans la quiétude du samedi, tellement plus que les pigeons et les merles. Quelle aventure se devait être, qu’avoir près de chez soi une telle étendue, où jouer, courir, se poursuivre et inventer des histoires ; et je me dis  que si un jour ces enfants, devenus adultes, revenaient voir ce fragment de leur enfance, sans doute seraient-ils surpris de le découvrir si étréci, tellement plus petit que dans leur mémoire, comme moi lorsque, lycéen, je vins avec mon copain Michel Pagel faire un peu de camping à Nantiat, Limousin, et découvris que l’étang des Rats, ce long et large lac de mes souvenirs, avait curieusement réduit presque aux dimensions d’une mare…