#1146

« Ce qu’on entend à travers les plafonds, ce qui vient des étages profonds, n’élève pas, ne baisse pas le ton: gravement, les paroles bourdonnent, le feutre tombe sur la bouche qui chantait, sur l’eau qui dans les cuisines coulait, sur tout ce qui se délivre et résonne. / Terrons-nous dans ces antres de laine, enveloppons notre rire et nos cris: il ne faut pas que le jour nous entraîne vers les lieux où le monde bondit! » (Jean Tardieu, « Les logements »)

#1145

« On n’est pas le même partout. Certains se redressent de plusieurs centimètres quand ils sortent de l’entreprise où ils travaillent, où ils s’ennuient (…). En vacances, l’organisation de notre journée change complètement. Nous nous intéressons à d’autres choses. Si nous allons à l’étranger (…) nous devenons un peu espagnols un peu américains, un peu tunisiens. Certains lieux sont particulièrement actifs, révélant des parties de nous-mêmes que nous ignorions ; c’est ce que j’appelle leur « génie », m’appuyant sur la tradition latine. Souvent, c’est parce qu’ils sont façonnés par l’homme, qu’ils sont la matérialisation d’une culture ou d’une époque. (…) Parfois ce sont des écrivains qui ont décrit telle ville, et dont nous avons l’impression de retrouver le texte à tous les coins de rue. » (Michel Butor)

#1143

Terminé la nouveauté de janvier, le très beau petit roman de James Patrick Kelly Fournaise, sélectionné l’été passé pour le prix Hugo. Connie Willis en dit carrément que « James Patrick Kelly est l’un des maîtres de la science-fiction. Fournaise est inventif, touchant et captivant. C’est Kelly à son meilleur, et il n’y a rien de mieux ». Rien que ça! Eh bien: commandez-le.

Presque mis à jour la compta de l’exercice courant, et rangé tous les papiers, ouf. Ce soir: direction Paris, il y a un petit salon à Sèvres demain. Vais rester quelques jours in Lutecia, ayant une réunion de représentants jeudi. Pas la pêche, encore un peu mal au dos, je vais tâcher de ne pas trop m’épuiser… ce qui, quand on n’est pas chez soi, n’est pas si facile… Pfff: le froid, l’hiver, la pluie, le vent, la nuit, le lumbago, la foule, tout me rend grognon, tiens, ces jours-ci.

#1142

Mon premier job éditorial — non: mon deuxième, après le recueil de Jean-Pierre Hubert chez Denoël — avait été de traduire un roman de « Dr Who », la vieille et très culte série anglaise de SF. C’était sous l’égide des frères Bogda, et finalement ça avait foiré avant même d’avoir commencé — les épisodes ne sont pas passés à a télé, les quelques romans sortis ont été immédiatement soldés (certains traduits ne sont pas parus du temps, d’ailleurs), l’éditeur a disparu. Anyway, ça m’avait fait découvrir le phénomène « Dr Who », un peu. Plus tard, j’ai vu quelques épisodes, en Californie. Puis quelques-uns encore sur la BBC. Un copain m’avait filé un coffret de cassettes, aussi (mais c’était la saison avec Colin Baker, apparemment la moins bonne).

Et maintenant, je renoue avec tout cela, en visionnant des épisodes des tous nouveaux Dr Who. Etonnant que cela soit Russell T. Davies, le créateur des séries gay Queen as Folk et Bob and Rose, qui ait relancé tout ça. Mais il est vrai qqu’un des perso de Queer était un fan du Docteur… En tout cas, belle réussite! Cette vieille license que la BBC ne s’était pas décidé à poursuivre depuis tant d’années, retrouve soudain une popularité remarquable. J’ai vu quatre épisodes de la nouvelle première saison, quelques autres de la deuxième. C’est vraiment plaisant, amusant, bien fichu. La British touch télévisuelle à son meilleur. Quant au « spin off », Torchwood, c’est un génial X-Files like situé à Cardiff: j’adore. Ah ah, jamais en France on n’oserait faire une série télé fantastique/SF, située en plus dans une ville de moyenne importance… Dommage! Laurent Queyssi me faisait lire l’autre jour un synopsis de série — pour un projet BD, certes, mais… dans un univers parallèle où la télé française ne serait pas toute pourrie, ça ferait une chouette série pour le petit écran… Enfin, les Britanniques se réveillent, c’est déjà ça.