Près de 640 000 signes. J’imagine que le roman courra jusqu’aux 650, alors. J’arrête pour ce soir mais je pense discerner comment finir tout cela. Le week-end prochain devant être mon dernier de l’été à cette résidence d’écriture, il semblerait que tout se « goupille » correctement, nonobstant les relectures et réécritures. Touching wood et tout ça. En parlant de bois, ce fut une après-midi de bourrasques, les grands arbres portent une voix de marée galopante, qui avec la puissante senteur résineuse m’évoque des plages et l’océan. Mais ce sont seulement les feuillages qui se brassent et bruissent.
Archives de catégorie : écriture
#5086
Marchant dans les prairies qui entourent le ventre vert de Champignac, je ne peux m’empêcher de m’inquiéter de ma capacité à mener à bien la fin de ce roman. De me trouver littérairement à la hauteur, quand il s’agit d’agiter le petit théâtre de scènes d’action, de peur et de chaos. Alors je me promène sous le ciel de nuées longues et pesantes, étalées en rubans gris et boursouflures anthracite. Au sol, le vent, la chaleur et le fauchage ont laissé une paille grisaillante qui tournicote en vortex fibreux. Le pas en soulève de minuscules papillons blancs. Tout au bout du domaine, le couple de chevreuils s’est enfui en me montrant leur blanc toupet de queue.
#5085
La nature paraît calmée, se gonflant de cette humidité fragile, un peu de pluie appliquée comme un baume sur ses rousseurs. Au potager tout est gouttelettes. Dans le ciel gris monte une masse orageuse noire, occultant la direction de Bègles. Installé à la petite table devant les volets ouverts de ma chambre, je respire, j’entends les pies, j’écris – 620 000 signes au compteur.
#5082
« Bombay tacos » cligne près de la gare une petite enseigne au cosmopolitisme échevelé. Le ciel pèse de ses nuées grises et rousses, se dégageant par déchirures lentes sur un bleuté encore tendre à cette heure matinale. Levé à 7h du matin pour partir en week-end à Champignac ; mission : la dernière partie de mon roman, pas la plus facile.
#5079
Entre chaleurs, incertitudes et des fragments de mon roman qui me flottaient en tête, comment aurais-je bien retrouvé le sommeil ? Par la fenêtre basculée pénétrait cette substance d’ombre un peu rouge que sécrète la ville endormie, si différente de l’obscurité aphotique de certaines nuits à la campagne. Et pas un zeste d’air, pas même ces froissements infimes, ces tintements fantomatiques qui feraient écouter la rumeur nocturne afin de glisser dans l’endormissement. Bientôt les 600 000 signes me disais-je, encore telle et telle scène à écrire, ruminais-je, et de rallumer le téléphone pour noter une fumée, un or acéré, un phare fondu, un comparse, une statuaire plâtreuse de salle de bingo.