#63

Depuis des années, toutes les oeuvres de Charles de Lint se déroulent dans la ville imaginaire de Newford. Une grande ville nord-américaine, sans doute plutôt au Canada qu’aux États-Unis, comptant dans les six millions d’âmes au dernier recensement, et près de laquelle se situe une réserve indienne, de la tribu des Kickahas.

Une ville actuelle, à cette différence près qu’à Newford…

magic lights dark streets; myths walk clothed in modern shapes; humans and older beings must work to keep the whole world turning.

À force d’en arpenter les rues, Charles de Lint nous a fait connaître les différents quartiers de Newford presque comme si cette ville existait réellement — vraiment un remarquable travail d’évocation/création urbaine. Il nous a fait connaître ses habitants, aussi: de texte en texte, certains figurants deviennent protagonistes principaux, puis repassent au second plan, on croise telle personne déjà entrevue dans un autre texte, telle autre personne parle en passant le héros d’un texte précédent… Et petit à petit, Newford se peuple de…

extraordinary characters — people like Joseph Crazy Dog, also known as Bones, the trickster who walks in two worlds at once; Sophie, born with magic in the blood, whose boyfriend dwells in the otherworld of dreams; Angel, who runs a center for street people and lives up to her name; Geordie, creating enchantment with the fiddle; Christy, collecting stories in the streets; the Crow Girls, wild and elusive…

Les romans & nouvelles se suivent — et ne se ressemblent pas. Charles de Lint évite remarquablement bien le piège de la répétition, de la facilité. Ainsi, Trader relevait-il plutôt du thriller, avec un seul élément surnaturel, central mais de peu d’ampleur. Tandis que Someplace to Be Flying ne mettait quasiment en scène que des êtres primordiaux (les esprits animaux ayant créé le monde selon certains mythes amérindiens). Que The Road to Lisdoonvarna était un pur polar, sans magie. Et que Forests of the Heart mêlait magies & ambiances différentes en faisant se rencontrer des éléments des mythes celtes, amérindiens & mexicains.

Et, paradoxalement, c’est pourquoi The Onion Girl semble dés le premier abord particulièrement précieux au fan de De lint: pour la première fois, l’auteur ose s’y (auto-)référer ouvertement à toutes ses créations précédentes. Car Charles de Lint nous raconte (enfin!) une histoire qui concerne la figure centrale de Newford: Jilly, héroïne ou témoin d’un grand nombre des nouvelles de De Lint, et personnage secondaire & discret mais toujours présent, quelque part dans le background (« I always know Jilly is somewhere on the city’s streets, even in stories in which she doesn’t actually appear on stage. », dit l’auteur), de l’ensemble des oeuvres sur Newford.

At the center of these entwined lives stands a young artist named Jilly Coppercorn, whose paintings capture the hidden beings that dwell in Newford’s shadows. Jilly has been a central part of the street scene since de Lint’s very first stories. With her tangled mane of hair, her paint-splattered jeans, a smile perpetually on her lips, she’s darted in and out of the Newford tales. Now, at last, we have Jilly’s own story, and it’s a powerfull one indeed… For behing the painter’s fey charm there’s a dark secret, and a past she’s labored to forget. (citations de la présentation de jaquette de The Onion Girl)

C’est bien entendu un risque, pour l’auteur: les multiples références à des événements antérieurs de la vie de Jilly peuvent désarçonner des lecteurs nouveaux venus, je suppose — et ce d’autant plus que De Lint ne donne aucune référence pour toutes ses remarques: peut-être a-t-il eu peur de trop alourdir son roman, en y glissant des notes de bas de page bibliographiques? D’autant, aussi, que la plupart de ces références concernent plutôt son oeuvre de nouvelliste que ses romans. De fait, une nouvelle est même intégrée telle quelle au corps de The Onion Girl.

Enfin, peu importe: pour ma part je ne vois pas là une faiblesse, mais au contraire une force accrue, puisée dans l’effet de familiarité (quoique j’espère bien que De Lint reviendra, ensuite, à des romans plus « isolés » & différents; il serait terrible que cet auteur que j’adore sombre un jour dans la routine). Et comme d’habitude, j’ai tout de suite été emporté dans l’imaginaire de De Lint, sa très personnelle & séduisante manière de tisser ensemble la réalité la plus dure & les charmes des rêves, le côté « polar » & l’aspect fantasy.

De Lint’s greatest strenght as a writer is not his impressive imagination, nor his ability to seamlessly integrate the folklore traditions and beliefs of the Irish, native Canadians, and natives of the Southwestern desert. Rather, de Lint’s greatest skill is his human focus — the mythic elements never overshadow his intimate study of character. De Lint is a romantic, a believer in human potential, and his fiction is populated not only with creatures of myth, but with artists and social workers, musicians and runaways, all creating intentional communities based on hope and dreams and mutual belief in the magic of the world around us. To read de Lint is to fall under the spell of a master storyteller, to be reminded of the greatness of life, of the beauty and majesty lurking in shadows and empty doorways. (citation de la revue Quill and Quire en 4e de couverture de The Onion Girl)

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