#2650

Je porte deux sortes de livres fantômes. Il y a ceux qui sont écrits mais ne sont jamais parus — deux suites de romans que les premiers éditeurs ont jugé de vente insuffisante et ce recueil psychogéographique dont l’éditeur ne s’est finalement pas concrétisé ; regret. Alors ceux-là, allez savoir, peut-être trouveront-ils un jour chaussure à leur pied, au moins sont-ils écrit, ils pourraient sortir, posthumes si besoin. Mais il y a aussi ceux que je n’ai pas terminé, et puis encore ceux que je n’ai pas écrit — ç’en fait deux maintenant que j’ai longuement cogités, amplement documentés, construits dans ma tête au point de me dire que leur écriture serait aisée, et puis patatra ! l’éditeur laisse tomber, livre annulé. Je viens de connaître l’un de ces discrets avortements livresques, et ma foi c’est du travail en moins, très bien, mais les idées étaient là et alors que les projets achevés voient généralement leur sujet s’étioler en moi, la connaissance acquise se faner, tandis que ces volumes parus prennent la poussière tout là-haut sur les deux étagères au ras du plafond où s’entassent livres de moi et livres avec moi, curieusement ces livres fantômes-là continuent à passer dans mon paysage mental, à me hanter un peu, en silence, intimement.

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