#2480

Me promenant dans un bois de pin, l’autre soir, j’entendis un chant d’oiseau que je ne connaissais pas du tout. N’y connaissant rien en volatiles, j’ai bien entendu été dans l’incapacité de l’identifier. Non plus que je ne sais quel est ce petit oiseau qui, perché sur l’antenne tévé de la maison d’à côté, chante chaque soir avec une belle énergie. Curieusement, son chant commence comme un raclement de gorge, un chrtt-chrtt quasiment électrique, comme le début d’un enregistrement abîmé, puis éclate en quelques  trilles. Il me faudrait des jumelles, tiens, pour essayer de distinguer au moins son plumage.

Je regarde beaucoup le ciel : à Lyon, je le faisais aussi, mais pas selon le même angle. De la fenêtre de ma cuisine, j’aimais particulièrement admirer les jeux d’éclairage au-dessus des toits, comme un vaste paysage qui s’ouvrait en un immense cône devant moi. Tandis qu’ici, depuis le jardin, il s’agit plutôt d’une vue de dessous, le nez en l’air, les yeux vers le firmament. Bien que ne faisant que, combien? une trentaine de mètres carrés, je suppose, ce bout de terrasse + jardin change ma vie. Espace de détente, à tout moment, où venir respirer ; portion de dehors où il fait bon vivre ; terrain d’amusement, à voir tout pousser, le moindre végétal m’intéresse, tout est neuf, excitant, comme le fait hier soir d’avoir mangé une petite salade de mes propres tomates assaisonnée de mes propres aromates… La petite chatte se tort de joie à mes pieds, sur la pierre blonde, ventre blanc arqué, pour exprimer le plaisir qu’elle a également à vivre là. Ces matins-ci, le jardin est couvert de petits pissenlits, fleurs jaunes brillantes, comme une constellation flottant juste au-dessus de la terre verte. Je n’ai pas encore saisi à quel moment elles se referment, peut-être quand le soleil passe de l’autre côté du haut mur ? Avant le soir en tout cas.

Les oiseaux, disais-je. Moineaux et merles bien entendu, comme partout. Observé une pie, l’autre matin, qui s’évertuait à tirer quelque subsistance du bord du toit de la maison mitoyenne à demi-abandonnée, la toiture doit en être bien vermoulue pour que la pie ait picoré tant et tant. Un faucon, grandes ailes étendues, qui s’en alla au-dessus de la résidence proche. Quelques colombes roucoulantes. Et quelques hirondelles, le soir, tournant et sifflant tout là-haut, j’assimilais depuis longtemps les hirondelles (ou sont-ce des martinets, je ne sais jamais? Swift en anglais, expression de leur rapidité) au ciel lyonnais, où aussi bien de la rue Récamier qu’ensuite du fond de la cour de la rue Paul-Bert j’ai toujours observé d’assez prêt leurs évolutions. Ici elles sont bien plus haut dans le ciel, moins nombreuses, moins bruyantes. Et puis souvent le vent souffle, les dispersant plus vite, le feuillage du palmier cliquète, un train gronde, les cloches du Sacré Cœur tintent, sur le boulevard grince un bus double, de la calme rumeur de la ville ne monte guère que ces sons métalliques, la ville semble en métal.

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