#2394

Un peu d’insomnie. Les yeux fermés et les oreilles tendues, j’écoute ce que la nuit peut bien raconter. Mais elle ne s’avère guère bavarde, dans cet environnement citadin il n’y a ni criquet ni grillon (ces derniers se trouvent dans le pierré du chemin de fer et leurs percussions acides ne me parviennent pas), non plus qu’hiboux ou chouette, encore moins crapaud ou grenouille. Le glissement de l’escargot, le pas de la fourmi, le tissage de l’araignée, le vol de la phalène, ne font aucun bruit. Il n’y a que le long grommellement d’un moteur sur le boulevard, une moto dans le lointain, le silence surtout, un instant le feulement de roues sur l’asphalte, le grand calme nocturne d’une ville de province. Un train passe, houle urbaine, je me laisse emporter par le roulis des vagues, le visage caressé par la fraîcheur.

#2392

Des fantômes en façade… Parfois en ville, en levant le nez s’aperçoit une ancienne publicité, que dis-je: une réclame, qui d’antan fut peinte là. Combien de temps encore les devinera-t-on ? Juste en amont de la portion tilleul du cours de la Somme, dans un angle haut perché de pierre blonde, se déchiffrent les lettres rougeâtres d’un Vin tonique au quinquina, auxquelles se superposent les grands contours noirs de la marque Antar en mémoire écaillée.

#2390

Erf, bon, va mieux falloir parler de petits oiseaux. Genre, durant ces quelques jours de canicule subite, je n’entendais plus le merle, au point que je m’étais même un peu inquiété : mais il était toujours là, et madame aussi, sautillant de branche en branche dans le troène et le micocoulier. Depuis cette nuit que la température est revenue à des niveaux agréables, le merle chante de nouveau, d’évidence la chaleur ne lui convenait guère.

#2388

Nature urbaine : non loin de chez moi, face à la caserne Nansouty, se tient une grande maison abandonnée. Un gigantesque tilleul assombri tout le petit jardin de sa masse et des branches dominent le trottoir. L’autre matin, passant par là, la senteur doucement miellée me fit penser qu’il y avait matière à une petite récolte… Je viens de m’y livrer, les mains levées vers le miel vert, et j’ai rapporté une satisfaisante brassée de ces fleurs pâles et odorantes. De quoi tisaner un peu à l’automne.

#2387

Là-haut, sous le toit, la pluie est ma musique. Piano et percussions. Je lisais l’autre jour, dans un essai sur la pluie, que contrairement à la manière dont il est traditionnel de l’illustrer, les gouttes d’une averse ne tombent pas comme d’un robinet avec un corps lourd et une tête pointue mais à l’inverse, tête arrondie en parachute et corps filant en pointe. Et je me demandais, combien il y a-t-il de noms pour les différents états de la pluie, dans la langue française ? Rincée, ondée, bruine, averse, pissée de chat, drache, abattée, abat d’eau, grain, saucée, berlée, guilée, crachin… Sans oublier le fait de pleuviner et celui de dégoutteler…