#2638

… il faut dire que j’insiste à caser tous les romans dans le bureau, un mur pour les polars — sur deux épaisseurs + ma collec de livres sur Londres — et la grande longueur pour tout le reste, donc forcément, à force on arrive aux limites de l’exercice — et de la pièce. Pour le moment, le « young adult » demeure également sur ces mêmes étagères, alors que la jeunesse est à l’étage. Ce grand mélange alphabétique provoque des rencontres ô combien démocratiques, du genre une belle édition du Winnie the Pooh d’A. A. Milne logé entre Steven Milhauser et David Mitchell, ou bien la suite Miyazawa-Modiano-Moorcock-Murakami avec casés en leur sein un petit Paul Morand et une fantasy animalière allemande par Erwin Moser… Foin des hiérarchies littéraires, mon premier Fleuve Noir Anticipation, Les Zwüls de Réhan de Gabriel Jan (1975), se trouve encadré par Ishiguro et les romans adultes de Tove Jansson…

#2637

On aura beau dire, je vis un drame. Hier soir, il me prit de re-ranger encore une fois ma bibliothèque principale, celle qui couvre le mur du bureau ovin. Il restait tout en haut une longue étagère portant en tas les anthos (formidables) de Datlow & Windling, les anciens Year’s Best Fantasy & Horror. Bon, je descend tout ça, je les range en pile dans le seul espace encore possible, et profitant de cette étagère libérée, monté sur une chaise ou juché sur l’escabeau, j’étale et je trie un peu les romans, en y introduisant ceux achetés récemment + quelques-uns qui étaient dans ma chambre. Et… c’est plein, c’est tout plein, c’est terriblement plein. À peine si l’on peut encore y glisser une douzaine de bouquins, et encore. Après cela… l’explosion ? Un drame, je vous dis, existentiel.

#2633

Où étant parti armé d’un solide parapluie et sous un ciel gris, l’intrépide explorateur urbain arriva sous un soleil radieux mais sur un parvis inondé et en large part déserté par des vendeurs craignant l’eau du ciel. Qu’importe, l’ambiance suffisait, un guitariste ajoutant d’ailleurs encore du soleil avec quelques reprises de Santana, et dans l’habituel brassage l’œil aiguisé du chineur dominical repéra tout de même un tantinet d’enfantina plaisant, avant de s’en retourner vers sa thébaïde solitaire.

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#2631

Je fini de lire un gros essai sur l’architecture et l’urbanisme anglais après la guerre (Concretopia de John Grindrod), c’est-à-dire l’invention des grands ensembles, des villes nouvelles, des centres commerciaux, des groupes scolaires, des cheminements piétons, des reconstructions ; les rêves de monorail, les utopies du béton, le brutalisme, le design émergeant… En enfant de Cergy-Pontoise, une des villes nouvelles pompidoliennes, tout cela me passionne et me parle intimement. Ces folies architecturales, ces révolutions sociales, ces esthétiques, ces échecs aussi, sont dans mon univers mental comme dans mon vécu.
Avec la mode du « vintage » j’ai refait mon intérieur dans un mélange fifties – sixties – seventies et, tout en m’intéressant également beaucoup à l’architecture et au design contemporains, je ne peux jamais me départir d’un allant, d’une attirance pour ces réalisations depuis si souvent décriées – par exemple, Mérédith m’avait dis pis que pendre de Lorient et la fois où je m’y suis rendu pour un salon, j’ai découvert un joli petit port délicieusement sixties, une petite ville comme dessinée par Franquin et Jidéhem. J’aime à Londres la Southbank, le Brunswick Centre et le quartier de Barbican, ou bien ici celui de Mériadeck. Et à lire le récit de certains échecs, les grands gâchis créés par le dumping social des gouvernants, certains principes erronés aussi, les futurs avortés, je ne peux m’empêcher d’une certaine tristesse, un pincement doux-amer (tout comme je fus peiné d’apprendre l’autre jour sous la plume de Dominique Douay l’échec d’un quartier de Villeurbanne que j’ai aimé, le Tonkin).
J’apprends aussi, amusé, que mon goût d’antan pour le bowling dans de vastes salles parquetées est à la fois un fruit de cette époque (on mettait des bowlings au sous-sol des centres commerciaux pour faire à l’américaine) et hélas d’après Mérédith déjà un artefact du passé. Enfant des seventies, j’en regrette certains aspects, le multicolore, les passerelles, le futurisme, l’audace utopique… Et j’avais été heureux il y a quelque temps de constater qu’au moins l’une de ces utopies urbaines, celle de mon adolescence, le sud de Cergy, a finalement si bien vieilli. Même si les monorails et les hélicoptères pour tous ne se sont pas concrétisés.