#4004

Plus ou moins en prévision de mon été d’écriture (bouhou) et en rupture de mes habitudes, depuis bien six mois je ne lisais plus que des auteurs de langue française. Ainsi ai-je relu une bonne part des Simenon, lu un bon paquet de Modiano et de Rouaud, picoré dans du Jaccottet, relu du Flaubert et du Maupassant, plongé dans du Ponson du Terrail et du Jean Ray, retrouvé du Morand, du Gracq, du Giono ou du Perret, revenu à du Vargas, du Rolin et du Sagan, exploré du vieux polar, de Mario Ropp à Jean-Pierre Ferrière en passant par Gaston Boca, Pierre Boileau, Antoinette Soulas, Louis Thomas, André Picot, Louis Rognoni ou Jacques Decrest… Et puis la langue anglaise m’appelait, me manquait, tout de même : après un paquet de Kim Stanley Robinson (nouvelles et novellae), deux Agatha Christie et quelques délicieux Margery Allingham, je relis tout Dorothy Sayers dans l’ordre. Eh oui, mes lectures sont souvent des relectures : ma mémoire est faible et j’apprécie de rafraîchir / redécouvrir régulièrement, le plaisir du recul et d’une nouvelle appréciation. Ce matin, la pie craquète et les mouches tournicotent, la météo annonce une journée torride – je ne sais si je vais avoir le courage ni la tête assez solide ce week-end pour enfin coucher dans un carnet l’histoire de « chats zombies » que j’ai imaginé pour m’occuper ces derniers temps, mais pour lire, toujours.

#3097

The Case of the Exploding Acanthe. Depuis quelques mois, une immense hampe avait poussé au sein de l’acanthe, couverte tout d’abord de pousses vertes qui elles-mêmes ont écloses en fleurs discrètes, enfin poussèrent des sortes de glands, maintenant devenu cosses – et aujourd’hui, celles-ci explosent. Clac, clac, quatre grosses graines rougeâtres sont expulsées et les deux segments des cosses brunes jaillissent çà et là. C’est vous dire comme ma vie est mouvementée en ce moment. Enfin, troisième jour sans vertiges, je touche du bois mais continue à me sentir tel un vieillard chancelant et viens de relire l’un des meilleurs Agatha Christie selon moi, At Bertram’s Hotel, tout emplie de vieilles personnes. Un remarquable roman choral – relu avec en partie un regard intéressé car pour mon « roman ambitieux » de l’an prochain, si possible, j’aimerai essayer une telle structure de polar avec quantité de perspectives différentes. À part cela, la mémoire est chose étrange, je me suis levé ce matin en songeant que je pense souvent à Roland, avant que je ne réalise pourquoi aujourd’hui.

#3095

« Me promener dans une ville comme on se promène dans un jardin. » J’économise ma lecture de Julien Gracq, et notamment de sa Forme d’une ville, tant j’aime la prose de cet homme qui hélas a enfermé la majorité de ses écrits hors de portée pour longtemps encore. C’est donc au compte-gouttes que je le lis ou le relis, au contraire de cet autre favori, Simenon, que je ne suis pas près d’épuiser. Niveau écriture personnelle, je viens d’avoir l’idée d’une courte nouvelle supplémentaire, que je compte rédiger ces jours-ci, mais pour ce qui est de récits plus longs je manque de voyages : basant en général les Bodichiev sur un lieu visité et sur lequel j’ai pris des notes, je n’ai plus guère d’inspiration dans ce réservoir – je pensais me rendre à Rome et Prague, la pandémie coupa net ces velléités de villégiatures. Et de mes voyages non « exploités » il se trouve que ni Lisbonne (que j’avais adoré) ni Vienne (qui m’a un peu ennuyé) ne m’avaient rien dicté car à l’époque j’avais remisé Bodichiev au titre des espoirs passés.

#3093

Il ne cesse de pleuvoir, dans mes lectures de ce fichu été : dans Une vie de Maupassant, puisque je relis ce cher Guy ; dans les Jean Rouaud, à commencer par le formidable deuxième chapitre des Champs d’honneur, certainement parmi les plus belles pages météorologiques ; et bien entendu chez Simenon, qui s’en défendait et pourtant.

#3028

Un Maigret des débuts, 1931. Formidablement chargé d’images et d’ambiances, une langue évocatrice et bien personnelle, les détails du passé et la gourmandise du style. Lecture parfaite pour jour de pluie où tout dégouttèle au dehors et où le férié rend la ville muette. Ciel livide et feuilles tremblantes. Un « roman gris » pour journée de grisaille.