#725

>> Paris Sibérie (7)

Il sera dit que je n’aurai encore vu la Maison de la Radio que de nuit — mais le décor s’y prête, les grands immeubles pixelisés de fenêtres lumineuses, de l’autre côté de la Seine, conférant à ce coin de Paris une splendeur nocturne ultra-moderne.

Auprès de la Maison de la Radio, cet imposant camembert de verre, le café « les Ondes » accueille à toutes heures la crème radiophonique. Je m’amuse à admirer la belle barbe blanche et les longs cheveux intellectuels de quelques habitués de l’endroit — sans doute des messieurs fort connus, mais n’étant ni très porté sur la culture Radio France, ni très « people », je ne saurai les identifier. Un moment, trois jeunes garçons, en âge de lycée, viennent s’asseoir non loin du groupe dont je fais partie: ah, la jeunesse dorée! Déjà l’autre jour, en sortant de Marmottan, m’étais-je amusé d’un groupe de jeunes gens bien mis, à la désinvolture chic — tous des BHL en herbe. Ceux-ci sont idem, cheveux mi-longs coiffés à l’anglaise, pardessus bien repassé, poses artistiques rendues attendrissantes par la jeunesse des protagonistes et leur conformité finalement naïve aux clichés de la bohême ultra bourgeoise. Pendant ce temps, mes copains et relations de l’émission arrivent peu à peu, nous discutons plaisamment, le garçon d’un certain âge prend les commandes avec nonchalance et en souriant sous ses bacchantes brunes, très Années Folles — voilà un parfait archétype parisien incarné. Passons sur l’émission, fluidement guidée, très agréable et érudite (mon co-invité, Xavier Mauméjean, m’étourdit par la brillance de ses propos), « Mauvais genres » n’a finalement qu’un seul défaut: de ne durer qu’une heure! Ainsi que le dit Angelier, l’exercice consiste à faire entrer un litre et demi dans une bouteille d’un litre. Mais lui et son équipe (que vient de rejoindre la toujours lumineuse Joëlle Wintrebert) y parviennent sans anicroches audibles.

Retour ensuite aux « Ondes », pour un dîner léger et bavard. Je termine cette agréable soirée chez l’ami Jo, non loin de chez mon oncle ce qui me permet de rentrer à pied. Etonnement: Clignacourt à 3h du matin n’est pas moins animé qu’à minuit, des gens passent dans la rue, le quartier ne semble ni désert ni spécialement mal famé (en dehors de quelques putes et maquereaux noirs, en arrivant à l’angle de chez Jean). Le froid brûlant de la journée a cédé la place à une relative douceur, la mairie du 18e rutile dans la lumière fauve des lampadaires, les arbres dessinent des motifs abstraits de leurs branches nues, sur le ciel entre bleu profond et nimbe rosé.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *