De ces micro expériences de week-ends à Champignac, tout ne peut se traduire en photo. L’averse soudaine de feuilles mortes du colosse magnolia, se frayant un passage dans un froissement brutal et finissant au sol comme autant de grandes écailles en cuir friable. La surprise alors que je me trouvais au téléphone, assis devant la maison sur les chaises blanches Napoléon III, d’une cavalcade de chevreuils, deux animaux roux bondissant hors de la prairie, traversant la pelouse dans un heurt de sabots, virant sous le magnolia déjà évoqué et filant dans les épis hauts d’un autre pré. Les pas de géants qui grattent sous les arbres, en fait le travail d’un merle qui s’enfuit en caquetant sa désapprobation. Une pluie de pollen, sous un cyprès, en hachures étincelantes. Ou la brève brûlure des orties sur ma cheville, plus prosaïquement.
Archives de l’auteur : A.-F. Ruaud
#3066
Quelques pas dans une prairie, pour admirer les moirures rosées de l’avoine et soulever des vols de papillons, tandis que là-haut tourne un épervier. « Fadet commun » me dit une recherche sur les petites ailes marron qui quittent l’abri des herbes puis y retournent. Pour les grandes ailes blanches qui, parfois, s’élèvent plus haut, ma mémoire d’enfance rapporte dans son filet un nom aux consonances familières, la piéride des choux.
#3065
Les chants des oiseaux à foison, le vert frémissant, les aiguilles des pins, les taches de soleil, les ombres bleutées, la fraîcheur qui tremble avant la promesse de la canicule… Au réveil, une soudaine levée de souvenirs, ceux de vacances étant enfant dans une grande maison au Pays de Retz. À Champignac cependant la mer est fort loin et c’est la rumeur de la départementale qui sert de mémoire des marées.
#3064
#3063
Par une telle chaleur, hélas, me manque le courage pour poursuivre ma petite exploration de Champignac. Et puis, il me reste encore à relire un grand pan de manuscrit, suite de mon marathon des week-ends. Je me contente alors de passer, un peu dolent, de l’ombre d’un cèdre au pied du mélèze puis au banc de pierre sous le séquoia, endroit dont j’avais déjà noté qu’il semble être le plus frais du domaine. Les pâquerettes accompagnent chaque pas et l’air embaume la résine. Assis au sol, le dos au banc, je saisi un léger souffle, une fraîcheur de terre et de mousse.
