Chaque année c’est la même chose : je guette le micocoulier qui, longtemps après le reste de la végétation, demeure à l’état de bourgeons… et puis un jour, boum ! Il est couvert de feuilles et je ne les ai pas vues s’ouvrir. Un autre mystère, ce sont les deux grands pieds d’azalées, qui ne fleurissent pas en même alors qu’ils sont côte à côte. Sur l’autre versant des voies, je viens de constater que l’abricotier qui fait mon envie se couvre déjà de fruits. Et les rues sont emplies de coquelicots, en tranquilles explosions rouge au bas des façades blondes.
Archives de l’auteur : A.-F. Ruaud
#3018
Le cerveau vide et le corps las, souvent une barre de ras-le-bol pesant sur la nuque, faut-il accuser le printemps ou plus simplement la longue traîne du régime autoritaire de la pandémie ? Chaque jour le soleil monte un peu plus haut et demeure plus longtemps en scène ; le jour tiède et les pluies nocturnes, tout semble un peu alangui. Encore une semaine et je me mettrais en congés, avec une forme de défi : volontairement aucune connexion du 8 au 16 mai, pour « lâcher prise » comme me l’a exprimé un ami. Je n’ai plus fait ça depuis mon emménagement à Bordeaux, il y a 7 ans. Et pris aucunes vacances depuis novembre 19, aussi, cela peut expliquer une certaine dolence.
#3017
#3016
Mon prochain roman bouclé hier matin (je pense), après l’attentive et sévère relecture de mon frangin Pagel, je respire un peu mieux. Les Trois cœurs sortira à la rentrée chez un petit éditeur de Saintes, Koikalit, et poursuivra mon exploration des vies des détectives Viat Koulikov et Jan Marcus Bodichiev dans une uchronie proche. Je leur ai déjà consacré trois petits volumes aux Saisons de l’étrange, et une poignée de nouvelles (un gros omnibus est prévu). Et de fait un autre recueil est en cours de finition, que j’espère achever cet été. Alors donc je souffle un peu, et avant de me plonger dans le fleuve tumultueux d’un Stefan Platteau (qui vient de me rendre le début de son prochain tome), je poursuis mes lectures polar « vintage », des Michel de Georges Bayard en Bibliothèque verte et des Jacques Decrest, l’un de ces grands messieurs du roman policier qu’écrasa le rouleau compresseur du néo-polar et le culte du « roman noir » : eh bien je le préfère gris, moi, le polar.
#3015
Retour de la lumière d’automne, après le grand éclat bleu de ces derniers jours. Marbré et tavelé, le ciel domine de ses grumeaux de grisaille une ville dominicale presque muette. Je déplore en hiver non pas le froid ou la pluie mais que portes et fenêtres closes me coupent de la rumeur urbaine, à laquelle j’aime prêter l’oreille, cet environnement sonore que je décris souvent : pour l’heure le souffle du vent, les grincements d’un train, une voix éloignée, le froissement de papier qui débute le chant du rouge-queue, les pia-pia des piafs, l’appel du coucou. Au jardin se pose un instant un merle au dos aussi tacheté de blanc que si la javel l’avait éclaboussé. Fausse impression d’un confin, la solitude d’une encoignure sans histoire sur la carte.
