#2513

Il y a quelques semaines, à l’issue d’un long périple et d’une tâche ô combien épuisante (voir le billet #2503, cher lecteur), le couloir de l’entrée s’est retrouvé soudain encombré de très nombreux cartons de bouquins — tous ceux qu’au fil des années j’avais descendu à la cave, à Lyon, faute de place et parce que je n’envisageais qu’avec réticence de mourir dans un grand étouffement livresque. Mais que faire de tout cela ? Un ami me suggéra de tout offrir au grand collectionneur local, monsieur F. S. M. et ce dernier me donna bien entendu son accord. Ledit ami me débarrassa tout de même de trois cartons, c’était déjà ça. Et puis mon assistant tria et mis en vente l’équivalent de trois autres cartons, fort bien, et ne résista pas au plaisir de se prendre trois autres cartons, excellent. Enfin, tout de même, je plongeai dans ces piles où s’entassaient tant de souvenirs et, triant, écartant, revenant, hésitant, sélectionnant, j’ai en définitive réincorporé à ma bibliothèque (bien plus vaste que celle d’antan) quelque chose comme une quarantaine de volumes. Ma bibliothèque se trouvant donc enfin rangée, repensée, j’ai redécouvert beaucoup de choses, et me suis fait des envies de relectures — notamment, dans le domaine de la fantasy. Commençant à rebosser sur le genre, de toute manière, il est bon que je me replonge dans ce style d’univers — qui avec ceux du roman policier sont ceux qui me séduisent le plus, je crois, un peu devant la science-fiction finalement. Bref, j’ai été saisi d’une nouvelle boulimie de lecture…

Daniel Hood avait publié aux États-Unis, dans les années 1990, une série de cinq polars fantasy, la série « Fanuilh ». J’ai re-dévoré les trois premiers déjà, et ces romans m’ont semblé encore meilleurs que dans mon souvenir, subtils, drôles, de cet indéfinissable charme qui s’attache au polar classique, l’ambiance pseudo-Renaissance et la magie en plus, une prose dorée, ciselée, sans esbrouffe mais réellement littéraire.

Summon the Keeper de Tanya Huff date aussi des années 1990, mais j’hésite presque à avouer l’avoir relu, tant c’est léger, rigolo sans prétention, et bordeline romance… Bon, je l’ai reposé dans un carton (une troisième lecture ne devrait pas s’imposer), mais c’était agréable. De la fantasy urbaine humoristique.

Ah, Barbara Hambly, voici une autrice sous-estimée et que j’ai toujours appréciée. Relire la trilogie de Dog Wizard m’a rappelé s’il y en avait besoin que j’aime également la fantasy la plus classique, et pourquoi/comment je l’aime. Superbement écrite, peuplée de personnages ayant de l’étoffe, de l’aventure pas sotte, un poil d’humour, un poil d’horreur… et même un poil de cyber. Chouette, quoi.

Et là j’ai bifurqué sur une nouveauté : le nouveau tome des « Peter Grant » de Ben Aaronovitch, très attachante série de fantasy urbaine actuelle, jusqu’à lors ancrée dans Londres mais qui cette fois part à la campagne, dans une ambiance de polar procedural à la Peter Robinson, très étonnante, l’articulation avec le côté magique devrait être intéressant.

#2512

Vous l’ignoriez, mais ces derniers temps s’est joué un drame atroce : le présent blog, créé il y a 13 ans et fort maintenant d’une simple broutille de deux milles cinq cent douze billets… a failli planter, suite à mémoire débordée et attaques de spam débordantes. Fort heureusement, mon webmaistre à moi que j’ai, le sieur Gizmo Mergey, a bondit à la rescousse et, après des heures et des heures de travaux, a tout réinstallé de neuf. Ta-daam ! (merci mon ami) Maintenant, on va tâcher de restructurer tout cela pour rendre plus abordable une telle masse, genre avec des accès thématiques et tout ça. Mais ce sera pour un autre jour, hein ?

#2511

Journée d’hier un brin surréelle. Après un déjeuner plantureux en compagnie de Denis Mollat, le big boss de la méga librairie / entreprise culturelle Mollat, et de la conseillère municipale à la culture (cousine d’un proche collaborateur ovin), visite privée de la librairie Mollat de la cave au grenier — et il y a à voir, le labyrinthe de la librairie proprement dite se couronnant d’un labyrinthe de bureaux et d’ateliers (où se prépare toute l’activité culturelle de chez Mollat : photos, reportages, vidéos de toutes sortes), de couloirs au plancher grinçant et d’escaliers bourgeois, de grande salle blanche avec piano quart de queue et de balcons au-dessus du tramway, et se prolongeant en cœur d’îlot par un stupéfiant et immense garage d’autrefois, deux plateaux sous des charpentes magnifiques, vaste espace actuellement vide (je me suis cru dans un épisode de « Grands Designs ») qui doit être prochainement transformé en galerie d’exposition et salle culturelle… Puis le soir venu, conférence d’Estelle Faye et dîner dans la même brasserie. Et ce soir, rebelote pour les activités un tantinet surprenantes, avec concours de « Miss Zombie » (dans le cadre d’une « zombie walk ») et dîner sur un bateau.

#2510

Je pense avoir eu raison de la perfidie des chenilles vertes. J’avais trouvé une première de ces bestioles dans le pot d’une misère, au-dessus de mon bureau, mais les petites crottes apparaissaient toujours, chaque matin, sur le plancher. J’ai enfin trouvé la deuxième. Sinon, cette maison est vraiment celle des araignées, il y en a partout, discrètes ouvrières. Mais les plus inquiétantes de ces arachnides locataires sont sans doute celles qui se cachent dans les combles, énormes, velues et… électriques (l’on peut donc dire que j’ai des araignées au plafond, pour ceux qui en doutaient encore). Ce sont elles qui gouvernent les branchements des différents lustres, dont certains refusaient de s’allumer. Après plus de deux heures de combat acharné, les ouvriers sont tout de même parvenus à apprivoiser l’une des bêtes, pour qu’enfin dans le salon-salle à manger trop longtemps pénombreux, fiat lux, chaque lampe s’éclaire convenablement. En revanche, échec pour le moment au bureau, dont l’araignée électrique tutélaire semblait plus complexe encore.

#2509

Il y a des jours comme cela, où je me sens bien peu rouchu, où tout me daille… Ah pardon, en français : des jours où je me lève déjà fatigué, un peu écœuré, où tout m’ennuie — vague à l’âme. Et puis un coup de sonnette du facteur, et à l’ouverture d’une grosse enveloppe, une belle, très belle surprise : un copain, ancien stagiaire des Moutons électriques, qui m’offre un ouvrage sur lequel il a travaillé. Et quel ouvrage, un carnet de voyage de Taniguchi sur Venise, dans la collection « Travel Book » de chez Louis Vuitton (car oui, le malletier Vuitton fait aussi des livres).

Dire que j’en fus touché serait un euphémisme, d’autant que ça a réveillé plein de choses en moi. La principale étant que j’ai « reconnu » la Venise que j’avais tant aimé, cette ville qui — avec un événement concomitant — m’avait plongé dans une état de joie persistant. Il y a des villes comme cela, qui m’ont inspiré du bonheur. San Francisco, Venise, Lisbonne… Je ne sais si je retournerai un jour dans aucune, je ne sais quel sentiment j’aurai alors, mais chacun de ces voyages m’a transpercé jusqu’à atteindre le petit nerf du bonheur, de la joie, celui qui vibre si peu souvent et si peu pleinement d’ordinaire.

SI j’étais riche, ah si j’étais riche, comme chantait Ivan, je n’aurai de cesse de voyager. Je suis bien chez moi, immensément bien depuis que je suis à Bordeaux, mais j’aime également voyager, et le fait de n’avoir jamais le moindre sou devant moi conduit à une certaine frustration dans ce domaine. Enfin bref, il est bien beau, ce livre de Taniguchi, avec son toilage, ses coins arrondis, et surtout la force de ses images, récit en aquarelles d’une sensibilité si juste. Taniguchi semble faire partie de ses personnes qui vivent dans un état permanent de nostalgie — c’est leur tension à eux, je pense aussi à Seth, par exemple. Je ne partage pas cette nostalgie, le présent me convient, mais je sais malgré tout apprécier leur sentiment, cette douce manière de considérer l’information sous-jacente au monde.