Depuis le début avril, le temps de finir tout ce qui devait l’être encore et de paperasser amplement pour les Moutons électriques, je ne fais guère qu’écrire. Oh, pas énormément chaque journée, je m’en tiens aux 5000 signes par jour au grand mieux, avec moult pauses pour réfléchir et laisser mûrir les idées / situations, mais enfin je n’ai sans doute jamais tant écrit de fiction qu’en ce drôle de moment. L’isolement conduit à la réclusion intellectuelle aussi, je vis donc dans ma tête, avec deux révisions finales de romans (l’un est maintenant en lecture chez trois éditeurs jeunesse, l’autre accepté chez les Saisons de l’étrange), quatre nouvelles bouclées, une pas encore terminée, et un roman inattendu que j’écris en ce moment — avec pas mal d’autres choses derrière : les quatre autres nouvelles du prochain recueil, toutes entamées ; un projet de novella avec des amis ; une nouvelle pour une antho, pas facile à mener à bien ; un autre roman qui demande à sortir peut-être… Et de redécouvrir cette forme d’obsession qu’est l’écriture de fiction, étant souvent obligé de prendre des notes le soir, revenant à l’ordi pour poser des bribes de dialogues quand les personnages ne se taisent pas, m’étant même relevé en pleine insomnie, cette nuit pour compléter un passage…
Archives de catégorie : écriture
#2899
Hier soir, je me disais qu’à force de demeurer entre quatre murs, de pièce en pièce et même au sein de mon minuscule jardin, je me faisais l’effet d’un personnage de bédé enfermé dans ses cases, et puis ce matin je vois sur Insta le scénariste Velhman citer quelqu’un qui a eu la même idée. Ce qui renforce donc mon soupçon : le réel existe-t-il encore ou suis-je dans une suite de cases ?
#2898
Drôle d’époque, oui, mais aussi, plus intimement, très personnellement, drôle de moment d’écriture. Vous savez, ou pas, que j’ai publié deux recueils de nouvelles sous le pseudonyme d’Olav Koulikov, chez le petit éditeur Les Saisons de l’étrange. En fin d’année, j’y publierai également un court roman, Menace sur l’Empire. Les trois ouvrages appartiennent au même univers, avec les mêmes personnages : une uchronie anglo-russe où le détective privé Jan Marcus Bodichiev et son assistant Viatcheslav Koulikov mènent, au fil des années, diverses enquêtes. Ces documents sur un univers parallèle sont réunis après la mort de Viat par son fils, Olav.
Il s’agit d’un univers auquel je travaille et cogite depuis de très nombreuses années : j’ai commencé à écrire ceci vers 1997 et, tout de suite, la première nouvelle fut acceptée par Serge Lehman pour son anthologie événement, Escale sur l’horizon. Beau début ! Las, ça n’alla guère plus loin : deux autres nouvelles furent acceptées pour des anthos qui ne virent jamais le jour, une plus tard dans la revue québécoise Solaris… et c’est tout, finalement. Moi qui avait démarré bille en tête, croyant tenir « quelque chose », je fus rapidement douché par les réponses des éditeurs : « trop polar et pas assez SF », « trop SF et pas assez polar », « c’est des nouvelles » ; les refus en pluie. Je m’accrochai un moment à cet univers, y trouvant même un refuge lors de ma dernière et douloureuse année de libraire : écrire pour s’évader.
Et puis il fallait bien que je me rende à l’évidence, je laissai de côté tout cela, avec beaucoup de textes inachevés, les Moutons électriques venaient d’être créés et me prenaient toute mon énergie, j’y investissais tout mon enthousiasme.
De temps en temps, par sursaut, je proposais encore le recueil — avec toujours des refus. Jusqu’au miracle tardif : un micro-éditeur qui se déclare vaguement intéressé, et au même moment, Melchior Ascaride, nouvellement éditeur, qui me téléphone qu’il adore et qu’il veut absolument publier Bodichiev. Ainsi décidai-je de signer Olav Koulikov, à la fois par jeu et par défiance envers les représentants d’Harmonia Mundi. Le placement fut bon, la vente fut bonne — ouf !
L’aventure continua donc, avec un deuxième recueil publié dans la maison devenue indépendante, et ces derniers temps les corrections du roman, troisième volet d’un cycle dont j’ai décidé qu’il en comporterait quatre.
Et puis voilà : je me retrouve maintenant dans la rédaction du fameux tome quatre, un dernier recueil de nouvelles et novellas. Et de me dire qu’il va falloir dire adieu à cet univers, trouver par conséquent moyen de « caser » dans ces sept dernières fictions tout ce qu’il me restait d’envies, thématiques, atmosphères… engrangées durant toutes ces années. Car bien sûr, sous couvert de ces petits polars, se glissent de très intimes inspirations. Le roman par exemple naquit de deux rêves, l’un sur mon boyfriend du moment et l’autre sur un garçon que je venais de rencontrer. Puis certaines scènes, oniriques aussi. Et des promenades dans Villeurbanne (aussi étrange que cela puisse sembler), puis encore un projet de bédé, puis enfin un projet de roman avec Ugo Bellagamba. C’est tout cela, qui se trouve concentré dans Menace sur l’Empire. Vingt années d’imaginaire, en fait. Des images persistantes à se tirer de la tête.
Idem avec le présent recueil, dont je viens d’écrire deux des sept nouvelles. Une étape indispensable : une petite histoire située à la fin de la vie de Bodichiev, lorsqu’il se trouve à la retraite à Biarritz. Une évocation de dirigeables et un petit aperçu de la maison du détective au bord du canal. Presque rien à chaque fois, mais des bribes, de micro atmosphères auxquelles je tenais. Ensuite ? Il faudra que je termine les deux novellas entamées il y a si longtemps ; une enquête de Viat seul serait plutôt bien, une histoire de fantôme si possible. Quelque chose en Italie, Firenze ? Mais il y a aussi une nouvelle située à Bordeaux, huit alors ? La fiction en forme de documents judiciaires, inspirée par les études de droit de mon fils (celle-ci est presque terminée). Ce sera alors le clap de fin. Allez, j’y retourne.
#2854
Ces deux derniers étés, j’ai écrit des romans — courts, dans le temps que je pouvais m’impartir. L’un a trouvé preneur, l’autre pas (pas encore, fit-il en feignant l’optimisme). Menace sur l’Empire et Après la guerre. J’ai réalisé, discutant ce week-end avec mes amis graphistes, qu’un instant je mélangeais le début de l’un avec l’autre : c’est que les deux remontent et bouclent, en quelque sorte, un imaginaire personnel développé il y a déjà longtemps, celui de certaines années lyonnaises, et que je me suis efforcé dans ces deux textes de capter, de circonscrire assez complètement. Menace sur l’Empire, il s’agissait tout d’abord d’un synopsis développé pour un copain bédéaste, qui n’alla pas bien loin, puis d’un autre synopsis, développé celui-ci avec Ugo Bellagamba dans l’espoir de l’écrire ensemble, cela n’alla pas non plus bien loin. Je n’ai rien gardé des apports d’Ugo, sciemment, afin de développer mes propres idées, ambiances, inspirations d’alors, si longuement infusées. L’autre roman était né d’un essai de début d’ébauche de collaboration avec Jean-Jacques Girardot puis d’une commande de Sébastien Hayez, les deux inaboutis. Deux éditeurs l’ont déjà refusé, les jeux sont faits, rien ne va plus.
#2852
Bonheur tout neuf : la couverture par Melchior Ascaride de mon prochain roman. Chez Moltinus, collection « Les Saisons de l’étrange », comme les précédents, mais cette fois il s’agit d’un roman — écrit l’été dernier d’après deux synopsis et un début… fort anciens —, pas d’un recueil de nouvelles. L’aboutissement de pas mal de choses dans mon imaginaire personnel. Arcologie, aérotrain, morts étranges… et une Menace sur l’Empire.