#6044

En défiance des averses possibles, une nouvelle portion de GR ce matin, en de longues perspectives gorgées de vert. La senteur des roses, les blancs flocons du cerfeuil, le jaune froissé des iris d’eau. Lacs, prairies, fossés et ruisseaux. Cigognes, moutons, vaches et chevaux. Et seulement quelques gouttes de pluie à la fin du chemin.

#6042

Chaque année je me dis que la prochaine fois je ne me ferai pas surprendre, que je serais plus vigilant, et chaque année je suis surpris. Quand les hirondelles sont-elles revenues ? Elles sont de retour, elles tournent et virent en sifflant ce soir dans un ciel transparent que hantent quelques bibendums blanc-rosés.

#6041

Hier soir, ma chatte est rentrée un peu tard de sa balade nocturne sur les toits. Avant de descendre croquer quelques bouchées, elle passa par mon lit affirmer son retour d’un petit miaulement, mais elle ne répondit pas lorsque je lui demandai de me raconter sa promenade. J’aurai aimé qu’elle me parle du froid des tuiles sous les pattes, du bleu de la nuit, des ombres du jardin, de l’odeur de souris au coin d’une cheminée, de celle de pie au creux d’une gouttière, du froissement des feuilles du troène, de la poussière du mur, du chant du merle et du chemin des fourmis.

#6037

Enchanteresse nature ce samedi, sur un sentier de digue entre zone humide, ruisseau et Garonne. Nous l’avions déjà emprunté un beau matin d’hiver tout en givre, cette fois il éclate d’une profusion impressionniste. Les grenouilles ricanent et gloussent, un chevreuil dodu s’éloigne avec prudence, les grands arbres dodelinent sous le ciel calme. Blancheur du cerfeuil et de la silène, jaune des boutons d’or et du colza, étoiles minuscules des pâquerettes, et l’eau qui brille, étincelle. De robustes graminées se dressent tandis que s’ouvre le chant des oiseaux, sous les piliers électriques, seule empreinte humaine, où grésille la fée dans des structures aux allures de fusée de Tintin. Un lieu secret et préservé.

#6027

Après la tempête Louis et ses rideaux de pluie, qui des jours durant battirent toits et rues, la ville se réveille frileuse et craintive sous le regard d’un ciel transparent et les caresses d’un soleil tendre. Tout luit et brille du ripolinage encore humide et les sons – trilles du merle, roucoulements du pigeon, cloches de l’église ou course du torrent – portent plus loin. Le tour d’un lac, les escaliers d’un coteau, un bouc dans son enclos. En retour de boucle, le ciel chafouin de nouveau illumine sur l’autre rive, indistincts derrière les branchages gris, une plage dorée et les ziggourats d’une blonde Atlantide, avant qu’une encre soudaine se répande dans les nuées. Sous le pont, comme la grêle roule sur le pavé, nous prend à son bord un providentiel bateau-bus prêt à partir.