Midi. Un instant au jardin, dans une douceur humide et parfumée, avant que la ténèbre qui montre plein ouest son cul de plomb chargé d’eau ne vienne réjouir les plantes à défaut des hommes. De tous côtés vibrent des fleurs dans cette lumière grise et un corbeau donne de la voix, rauque, couvrant un moment les roucoulements proches et les gazouillis plus lointains. Le vent arrive, les feuillages bruissent, la lumière baisse : rentrons vite. // Plus tard : jour blafard et frileux. Au jardin ne glissent plus que les escargots, tout bave et dégouttelle, les têtes jaunes d’une sauge hochent sous le crachin. Le ciel grommelle.
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#2776
Non mais, des fois, juste parfois n’est-ce pas, je me demande si je n’aimerais pas un tout petit peu trop les livres. Mais juste comme ça. Genre, je bosse toute la journée sur des livres, et en plus, en ce moment mon stagiaire est le fils d’un autre éditeur. Et puis le soir, ma vie sociale c’est par exemple d’avoir été samedi à l’anniversaire d’un pote bibliothécaire, où j’ai tchatché avec un imprimeur, un graphiste et une libraire. Lundi, à la réunion mensuelle du Club de l’Hydre, au bar de la librairie Krazy Kat. Puis ce soir, j’ai été à la soirée BD mensuelle La 9e Case, au bar de la librairie La Zone du Dehors. Et demain soir, il y a trois copains qui font une conférence à la librairie Mollat. Mais bon, ouf, heureusement dimanche matin il y aura la brocante Saint-Michel, histoire de chiner un peu des vieux livres…
#2772
Rentrant de l’anniversaire d’un copain par les rues calmes du quartier Saint Augustin / Parc de Lescure, que je connais assez peu ; ce doit à peine être ma troisième ou quatrième balade dans ces parages, d’une ample beauté. Marcher sur de larges trottoirs couverts de fleurs roses, sous les blanches façades Art déco, dans une nuit douce, bleue et rousse.
#2771
Depuis le week-end dernier, un couple d’amis lyonnais était de passage en notre rivage aquitain. Et comme l’on a les copains que l’on vaut, il s’agit d’invétérés amateurs de brocantes et de vide-greniers, quel hasard ! Nous fîmes donc des tours au déballage dominical de Saint-Michel et au marché finissant des antiquaires des Quinconces, croisant au passage quelques augustes hommes de lettres (PM, FSM et PJT, pour ne pas les nommer). Puis comme si cela ne suffisait pas, nous profitâmes de l’annonce de deux vide-greniers pour aller visiter un peu la voisine Libourne, bourgade fort jolie quoique très génériquement « petite ville française » dans ses moindre détails. Et ainsi, inlassable entasseur qui prend les livres pour des injections thérapeutiques du meilleur des calmants, j’ai donc rapporté par exemple quelques numéros du mensuel Hercule des années 80 (avec des « As » de Greg dedans), des Flaubert dans la si belle édition du centenaire pleine d’illustrations (il y a même quelques Vallotton !), un petit Giono de propos grognons et si sublimement écrits (Triomphe de la vie) et, comme si cela ne suffisait pas, une pesante encyclopédie Larousse de 1953 sur La Mer, emplie de très belles photos et de pas mal d’aquarelles, avec même une jolie section sur les légendes maritimes — dont j’ai illico tiré une notice supplémentaire et trois nouvelles images pour l’édition intégrale du Dico féerique dont je m’étais pourtant juré qu’elle était désormais bien bouclée (ça part bientôt chez l’imprimeur) —, mais bon, à 2 euros, comment abandonner un si bel ouvrage je vous le demande un peu ?
#2770
Insomnie. Aux vagues anxiétés brassées par la chimie interne répond l’obscur immobile du petit matin. Le soleil ne se lèvera que dans une heure. Par moments de brèves averses heurtent le carreau, tandis qu’au dehors les oiseaux interrogent un ciel confus, qui n’étale encore qu’une pâte lavée de toute couleur. J’imagine le merle en vigie sur l’antenne de la maison voisine, le bourdon d’un scooter file au loin et près de moi lève et retombe l’haleine tranquille d’une des chattes.
