#3002

Après plusieurs jours de beau ciel bleu que voilait un fin film de pollution gris-rose, le temps revenant à la pluie vient d’opter pour la grande grisaille et l’on dirait que la vie, au dehors, a du mal à embrayer, ni la nuit ni le jour, dans une tiédeur poussiéreuse qui retient son souffle avant l’averse.

#3001

Une bibliothèque n’est pas chose figée, elle ne cesse d’évoluer et, parce que l’espace est fini, j’ai retiré de mes rayonnages pas mal de volumes ces temps derniers, condition sine qua non d’acquisitions nouvelles. L’exercice est intéressant, qui exige de s’interroger sur la pertinence de certains choix et des opportunités de relecture. Pleinement subjectives, ces décisions écartent donc Asimov et Clarke comme des ringards que je ne me vois pas relire un jour, tout en conservant Paul Béra, Algis Budrys, Chad Oliver ou Lloyd Biggle Jr. qui pourtant ne sont pas moins « has been ». Pourquoi avoir gardé du David Gemmell, allez hop. En littérature « classique » prennent un peu plus leurs aises Carco, Colette, Giono, Modiano et Sagan. Et de redescendre en l’espace un peu dégagé des titres « jeunesse » comme Tove Jansson ou Brian Jacques que je préfère voir ici. On bouge, on change, ou pas.

#2999

J’ai lu hier soir les deux préfaces de Timothée Rey à ses pavés chez Mnémos consacrés à Fritz Leiber, un boulot formidable. Je ne lis quasiment jamais de traductions (de l’anglais) mais là, il s’agit d’omnibus sans équivalents américains, c’est remarquable. Et en début d’une des préfaces, Tim se permet de citer Paul Morand, avec les précautions d’usage : eh oui, il est clair que Morand était un absolu sale type — il faut lire par exemple l’essai Le Soufre et le moisi de François Dufay (chez Tempus), ah ce titre formidable ! —, mais oui aussi, quel style, et les carnets de voyage de Morand demeurent très lisibles, sans le poids de l’idéologie rance du bonhomme ni de ses mondanités rassies, de beaux documents dans une grande langue. Quel style, oui, que j’admire vraiment comme travail de pure écriture – et je me souviens qu’un jour, Ugo Bellagamba m’avait fait lire le début d’une traduction de Babbit de Sinclair Lewis dans un vieux Livre de Poche à couverture peinte, et ces premiers paragraphes étaient du bonheur parfait — traduction de Morand, stylistiquement supérieure à l’original (même si le roman de Lewis est superbe).

#2998

Mes rêves sont tumultueux et bien symptomatiques en ce moment du sentiment d’enfermement et de perte de vie sociale, de toute ces frustrations. Cette nuit je me trouvais plus ou moins à Londres en compagnie de Melchior et Mérédith (et de leurs compagnes), mais horreur malheur, nous portions des masques, même dans mes rêves maintenant j’ai intégré cette contrainte-là. Et de jour, horreur malheur il n’y avait pas un brin de vent la semaine dernière et à chaque sortie je me suis payé un beau mal de crâne, particulièrement carabiné samedi en rentrant des parages pourtant si verts du pont d’Aquitaine : pollution maximale et empoissonnement au dioxyde de carbone — d’ailleurs on distinguait à l’œil nu le voile fatal, un trouble gris-rose sur la ville. La pluie cette semaine devrait au moins rabattre les particules. C’était le message grognon du lundi matin.