« Brillant comme un sou neuf », est-ce que cela se dit encore? C’est l’expression à laquelle j’ai songé en sortant ce matin, dans une ville ripolinée de pluie sous un soleil éblouissant malgré la montagne de nuages. « Rutilante » ne doit pas s’utiliser mal t’a propos comme c’est devenu courant, les rues n’affichant rien de rouge mais plutôt le vert des voies du tram, le bleu du ciel reflété dans l’éclat des flaques et le blond des façades rénovées. Je m’en réjouis chaque fois, jamais tout à fait habitué à ces pierres si propres, moi l’enfant du Bordeaux noir des années 1980, quand la ville se maquillait de suie comme les garçons d’alors mettaient du khôl à leurs yeux. Entre deux averses, la ville est neuve.
Archives de l’auteur : A.-F. Ruaud
#3003
Reminiscence drive. Une remarque primesautière hier soir de mon camarade graphiste m’a fait songer à un ami disparu. Avouerai-je que j’ai oublié son nom ? Thierry. Son prénom était Thierry. Il s’est suicidé, après son divorce. Un beau jeune homme rouquin, qui était amateur de danse contemporaine et qui, avec un autre copain de cette époque lointaine, m’initia un tout petit peu à ce domaine artistique que je ne soupçonnais pas pouvoir aimer — mais si, bien entendu, j’ai adoré les quelques spectacles que nous vîmes alors, maison de la danse, ballets, compagnie Philippe Gentil, butō… Plus tard, lors d’un voyage à Amsterdam, je vis encore une chorégraphie, à la fois drôle et narrative, tellement esthétique — et je crains bien n’avoir plus jamais revu de danse contemporaine depuis, tant il est vrai que « on ne peut pas tout faire », et qu’en culture, beaucoup repose sur des découvertes avec des compagnons. Cela m’a fait resonger aussi à ce phénomène lyonnais d’une ville de passage, où sans cesse je devais reconstruire des cercles amicaux car chacun partait, au bout d’un moment, peu restaient à Lyon. Alors, des cercles successifs, comme des ronds dans l’eau de ma vie, le roux Thierry donc, Lionel, Jérôme, Charlotte, les pow-wows, Béatrice, David, Régis, Werner, la Gang, Olivier, Axel… et puis marre, je suis parti à mon tour.
#3002
Après plusieurs jours de beau ciel bleu que voilait un fin film de pollution gris-rose, le temps revenant à la pluie vient d’opter pour la grande grisaille et l’on dirait que la vie, au dehors, a du mal à embrayer, ni la nuit ni le jour, dans une tiédeur poussiéreuse qui retient son souffle avant l’averse.
#3001
Une bibliothèque n’est pas chose figée, elle ne cesse d’évoluer et, parce que l’espace est fini, j’ai retiré de mes rayonnages pas mal de volumes ces temps derniers, condition sine qua non d’acquisitions nouvelles. L’exercice est intéressant, qui exige de s’interroger sur la pertinence de certains choix et des opportunités de relecture. Pleinement subjectives, ces décisions écartent donc Asimov et Clarke comme des ringards que je ne me vois pas relire un jour, tout en conservant Paul Béra, Algis Budrys, Chad Oliver ou Lloyd Biggle Jr. qui pourtant ne sont pas moins « has been ». Pourquoi avoir gardé du David Gemmell, allez hop. En littérature « classique » prennent un peu plus leurs aises Carco, Colette, Giono, Modiano et Sagan. Et de redescendre en l’espace un peu dégagé des titres « jeunesse » comme Tove Jansson ou Brian Jacques que je préfère voir ici. On bouge, on change, ou pas.
#3000
C’est plus particulièrement not’ bébé, à Melchior et à moi, la « Bibliothèque dessinée » des Moutons électriques, petite collection de romans graphiques qui vient d’atteindre les huit titres, et vraiment, je trouve que ça ne manque pas de panache. Six autres au moins sont en « développement », comme on dit, et ça nous excite toujours autant.
