Un peu de soleil après la pluie. Réveillé cette nuit avec l’impression qu’une grande lance de solitude me perçait le flanc, puis soulevé par une vague de chagrin. Pour me calmer j’ai lu longtemps, relu plutôt, un petit ouvrage de « nature writing » anglais sur un séjour solitaire de 5 ans dans une bâtisse perdue sur une colline galloise (Deep Country de Neil Ansell). Une averse battait sur le vasistas. Le jour je termine la lecture du troisième et dernier volet de la somptueuse et étonnante trilogie de Jaworski, avant d’autres manuscrits. Ce ciel bleu réconforte.
Archives de l’auteur : A.-F. Ruaud
#5091
Du vivant de mon parrain, je ne me permettais pas de poster de photos de sa maison. Maintenant, allons, voici quelques clichés de ce paradis perdu. Un havre où je suis allé 5 années durant, plus particulièrement un week-end sur deux durant ces trois dernières années, l’été et l’automne. Ce fut une belle résidence d’écriture et de flânerie — un privilège.
#5090
#5089
Un petit mot triste. Depuis trois ans j’allais régulièrement passer des week-ends dans un joli domaine près de Bordeaux, que par discrétion je surnommais Champignac. Je lui fais aujourd’hui mes adieux, mon parrain son propriétaire venant de mourir ce midi, à 88 ans. Je l’avais mis un peu en scène, et le domaine plus encore, dans une nouvelle intitulée « Les Deux morts de Mademoiselle Rose », in Archives d’un détective à vapeur. De bons souvenirs, l’écriture d’un gros roman et de plusieurs nouvelles, ainsi que le début d’un autre roman, demeureront à inscrire au titre de ces séjours. Merci mon parrain.
#5088
Qu’est moche désormais cette amorce de la rive droite de Bordeaux, couverte d’une architecture médiocre, des chameaux gris au long cou et des girafes myopes aux meurtrières serrées. Ensuite s’étire toujours le désordre des entrepôts puis, le train passé sous le pont d’Aquitaine, ce sont les camions et voitures en rangées de boîtes brillantes, les silos rugueux et les tubulures baveuses du port. Un maussade paysage industriel auquel succède le mitage mesquin des pavillons individuels. L’on franchit une Dordogne à l’eau beige et enfin s’étalent les mares de prés détrempés et les arbres dépeignés, feuillages rouges ou jaunis, sapinières basses et élans sombres des pins : défilent les verticales et les débordements liquides. Chaumes blonds, vallons verts et terres roussâtres, sous un ciel diaphane et frileux. Des balles de paille s’espacent comme les pièces d’un jeu de dames. Vu au travers d’un champs la course d’un renard, au-dessus d’un autre le plané d’un corbeau et sur une rivière un groupe de pigeons, envol gris et blanc.