#2259

La chaleur, c’est comme une maladie, une fichue infirmité.

Chaque été ou presque, cela s’abat sur moi comme une malédiction, m’obligeant à rester calfeutré, à vivre dans la pénombre, à jouer du store, à surveiller nerveusement la différence entre la température extérieure et la température intérieure, à vérifier le matin combien il fait et à vite fermer les fenêtres, à consulter la météo le désespoir aux tripes en priant pour un effondrement du temps… Parce qu’impossible d’aérer mon appart, dont toutes les fenêtres donnent sur la même façade. De plus, les murs, une épaisse muraille en mâchefer, emmagasinent la chaleur. Alors même hors canicule cela s’accumule, la température ne retombe pas assez la nuit. Et je sens ma vie se racornir, les coins roussis, enfermé comme je le suis, pas de lumière, pas de promenade, une vague nausée et une vague migraine, la respiration qui se bloque. Et le ventilo qui bloblotte, et la grosse clim mobile qui gronde et qui lutte, et l’ordi qui montre des signes de faiblesse. I hate that: mais que fais-je à Lyon? me demande-je chaque été.

Sur les conseils du professeur Mauméjean, je viens de lire le journal de Barbellion, un naturaliste anglais mort en 1919 à l’âge de 28 ans, d’une santé catastrophique toute sa courte existence (il s’agissait en fait d’une sclérose en plaques) et qui passait une bonne part de son temps à râler, grogner, rouspéter… et je me sens un peu comme lui, en ce moment, alors que j’ose espérer qu’en temps normal je suis un peu moins bougon, mais en ces semaines de chaleur je trouve la vie absurde… Alors je relis des Wodehouse, pour rire un peu (ou beaucoup), et j’écris, tête baisée, front plissé. Nothing else to do.

Spring came late, but when it came it was hand-in-hand with summer, and almost at once everything was baking and warm. (Nancy Mitford)

#2258

Right ho! Après Hercule Poirot, une vie, je suis encore et toujours en pleine Bibliothèque rouge, rédigeant mes papiers pour le volume Londres, une physionomie (qui doit sortir en mars 2013, en même temps que son petit frère Paris, une physionomie que je co-dirige avec le sieur Alexandre Mare). Écrit un article sur le Londres d’Hercule Poirot (48 000 signes), un autre sur le Londres de Jack l’Éventreur (38 000 signes), maintenant j’entame celui sur le Londres de Jeeves — chic !

Mais il fait chaud, pff, trop chaud. Ou selon les mots immortels de Bertram  Wilberforce Wooster : « It was the hottest day of the summer, and though somebody had opened a tentative window or two, the atmosphere remained distinctive and individual. »

#2257

C’était dimanche dernier, en tout début d’après-midi. Quelqu’un sonna à la porte: oups, j’avais presque oublié qu’un journaliste voulait m’interviewer, pour un site web, un blog vidéo ou quelque chose comme ça. Bon, eh bien pourquoi pas.

Ce fut surréaliste.

Mon intervieweur a d’abord voulu que je lui parle de Philip K. Dick (sujet que je connais fort mal), puis il eut envie que j’évoque la question de la gnose chez Dick. La question de la quoi? Là-dessus, Axel sortant de la douche pénètre en slip dans le salon. Puis le journaliste veut qu’on continue dans le couloir — le minuscule bout de couloir obscur où contre un mur s’étagent les stocks VPC des Moutons électriques. Et de m’interroger en s’agenouillant contre la porte des WC… Je ne sais ce que va être le résultat de ces acrobaties physiques et verbales, mais croyez-moi, je ne vais pas essayer de me regarder!

#2256

La science avance : hier j’ai calculé les âges de Jeeves et Wooster, aujourd’hui j’ai trouvé l’église de Londres où, en bon catholique, Hercule Poirot allait certainement prier. Moi j’vous dis, je gagne pas beaucoup de sous mais je ne m’ennuie pas.

#2255

Un entretien à lire, très éclairant, d’Ayerdhal évoquant les actuelles attaques contre le droit d’auteur. Abrogation, abrogation !

Et j’ai bien d’autres questions, tiens, sur tout cela. Genre, le gouvernement socialiste agira-t-il dans le sens de la défense des auteurs, ou bien laissera-t-il le puissant lobby des grands éditeurs imposer ces lois et accords iniques? Le gouvernement socialiste reviendra-t-il aussi à la TVA du livre à 5,5%, comme promis par le candidat Hollande, ou bien cèdera-t-il au lobby puissant des libraires, qui se foutent complètement que les auteurs voient leurs royalties diminués d’autant? Le gouvernement socialiste imposera-t-il les PME, et donc les petits éditeurs indépendants, à 15% contre 33% actuellement, comme l’a promis le candidat Hollande? J’attends de voir… fit-il encore sceptique.

Et suis ravi que le syndicat d’auteurs SELF soit sur le point de renaître.

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