#2772

Direction Paris pour un aller-retour dans la journée. La température presque printanière pourrait semer le doute mais l’hiver n’est pas achevé, le vert ne s’affiche qu’aux sapins, avec à leur pied l’écume jaune des ajoncs, vive sous le ciel gris. Le reste du paysage demeure pâle et griffu, les branches nues, l’herbe rase, les fougères en une mousse roussâtre. Les pins tendent leur long cou au-dessus des fantômes de bois encore du blanc-rosé du sommeil, les champs sont en pyjama raillé, les vignes des bâtonnets tordus, la caillasse blanche comme os, parfois un petit arbre se couvre de l’éveil de fleurs blanches, d’un minuscule cimetière jaillissent les flèches d’ifs sombres.

#2771

Je lisais dehors, le cul sur un coussin pour me protéger de la rudesse de la chaise en fer, et le bleu lumineux du ciel se voilait d’à peine quelques volutes blanches en ce printemps de février. Des petits bruits de dégringolade crépitaient de temps à autres du côté du mur, comme des miettes,  et la chatte, à mes pieds, se tenait aux aguets. Au bout d’un moment le coupable se montra, en équilibre sur une branche du troène, au-dessus de la haute muraille. Le merle picotait des graines, ça grinçait et se balançait, tranquille. La chatte monta sur l’autre chaise, en miaulant parfois et me coulant des regards interrogatifs. Notre bonhomme merle, son repas fini, sauta sur le sommet du mur et demeura là longtemps, parfois silencieux, attentif, parfois chantant, artiste. La chatte épuisée par tant d’émotions rentra et monta à l’étage se coucher sur mon lit. Le gros volatile noir gazouillait, pépère, pensif, puis se décida à prendre son envol.