#2367

Opération « démontage / remontage de la cave-stocks des Moutons », done ! Trois jours de travaux harassants. Tout est monté, plié, trié, rangé, nettoyé… Ouf. En 12 ans, le petit stock d’exemplaires VPC / SP / auteurs / livres épuisés des Moutons électriques est passé par un garage über poussiéreux à Villeurbanne, une cave ultra obscure et cendreuse à Lyon, un garage lointain et humide à Lyon… et ces dernières années, dans ma cave bordelaise, claire et sèche, mais le foutoir de cartons entassés n’était plus gérable, il fallait vraiment installer des étagères pour s’y retrouver durablement. Ça peut sembler rien du tout, mais ça va nous changer le boulot, assurément.

13071734_10201430301994720_5386340942296957996_o12998147_10201430301914718_7782172781890472145_o

#2366

L’île de Mayotte est un département français. Mais bon, c’est loin, hein? Alors c’est pas comme si les médias français, pour la plupart basés à Paris et qui déjà ne savent pas bien que le reste de la France existe, allaient parler de Mayotte. C’est vrai quoi, c’est pas comme si dans un département français, en ce moment, (je cite le camarade Tim Rey) : « L’île est en grève générale plutôt musclée depuis dix jours (et ça risque de durer). Des barrages partout sur les routes, le port bloqué, des bandes d’ados avec des barres de fer et des coupe-coupe longs comme le bras qui circulent de jour pour aller « régler des comptes » avec des gars d’autres villages : ils profitent du « climat insurrectionnel » pour se lâcher. Et plus rien dans les magasins. » Tout va bien, la presse parisienne n’en parle pas donc ça n’existe pas.

#2365

L’autre jour, mon assistant me disait que j’avais tort de n’évoquer que mes lectures polar-fantasy, que le reste serait intéressant à commenter, aussi. Bon. Eh bien donc, ma lecture favorite du moment s’intitule Adrift, c’est par une journaliste anglaise nommée Helen Dabbs et c’est du nature writing à propos de Londres et de ses cours d’eau – sujet que j’adore s’il en est. La dame habite à bord d’un narrowboat, une petite et étroite péniche anglaise. Et elle le raconte avec un talent appréciable, une langue juste et belle, sans trop en faire ; on voit que depuis son premier livre, un petit truc où elle suivait un an durant le minuscule jardin qu’elle avait planté sur une terrasse, écrit quand elle était dans la vingtaine, eh bien elle a bcp écrit et bcp appris, car c’est en écrivant que l’on apprend à écrire… Et si son premier était sec, pas à la hauteur de ses ambitions, cette fois une dizaine d’années plus tard elle est devenue une autrice de nature writing accomplie et poétique, maîtrisant bien cette forme littéraire qui, dans son déploiement anglais, me séduit tant. J’ai d’ailleurs vu avec amusement que l’attachée de presse de chez Gallmeister est très fortiche pour faire gober des mensonges : toute la presse française répète que le nature writing est américain, à l’instar des textes traduits chez Gallmeister. Quelle sottise, quelle imposture. Le nature writing est britannique aussi, bien entendu, et ô combien. Qu’est pénible cet américanisme galopant de la branchitude française, bon sang de bois.

Sinon, hier soir, toujours trop crevé pour parvenir à fixer mon attention, c’est terrible, j’ai un peu papillonné de livre en livre, assis sur le plancher, à côté d’un des rayonnages d’art du salon. Vous connaissez Hiroshi Unno? Le monsieur est un historien d’art japonais, qui produit des livres bien beaux et bilingues japonais/anglais, aux précieuses couvertures (il faut que je me renseigne sur cette technique d’un vernis sélectif métallique, l’effet est renversant). Il a produit ainsi de gros artbooks (comme disent les geeks) sur Georges Barbier, William Morris et Harry Clarke. De quoi faire briller mes mirettes et alimenter le travail que je prépare…

Et puis enfin, lu de larges chapitres de deux recueils de critiques d’art, l’un par le peintre Jacques-Émile Blanche (contemporain des impressionnistes) et l’autre par un historien d’art moderne des années 1970-80, André Fermigier.

#2364

Mars m’a tuer. Ce fut un mois un peu rude : le voyage à Londres était über agréable mais ultra fatiguant ; la petite bronchite n’arrangea rien ensuite ; le salon du livre de Paris fut comme il se doit épuisant au dernier degré ; et non encore remis, le week-end dernier ce fut un autre salon, à Bordeaux. Lors de la fête d’hier soir j’étais K.O. et tout fondu, je me sens moulu, la cervelle enchiffrenée (« comme un chiffon froissé »), les yeux qui piquent, le cou endolori… Au point que j’ai arrêté de bosser, tout à l’heure, à la fois trop crevé pour continuer et pas assez peut-être pour faire une nouvelle sieste, tendu, lessivé… Ai été un peu me promener, papoter avec des copains libraires, acheter du chorizo espagnol frais… Enfin, le quotidien va retrouver ses marques, le corps s’apaiser, les habitudes de lecture, d’écriture, de boulot, de facebooking, de blog… reprendre leurs droits.

#2363

Outre quelques manuscrits, qu’ai-je lu ces dernières semaines? Bien moins de livres que d’habitude, du fait d’un emploi du temps chargé et bousculé par différents salons, qui occupent et qui fatiguent… Mais tout de même : The Spirit Murder Mystery de Robin Forsythe, une réédition de polar Golden Age comme il s’en fait de plus en plus outre-Manche, encore un auteur que je ne connaissais pas. Amusant, astucieux, ma cervelle a besoin de manière régulière de ce style de gentils puzzles anglais. Trouvé dans une « boîte à lire », du faux polar historique, genre que je n’apprécie que peu en général, ne goûtant guère l’aspect carton pâte de la plupart de ces productions actuelles. Une reliure d’Emily Brightwell sur son personnage de Mrs. Jeffries, j’ai lu le premier, The Inspector and Mrs. Jeffries. C’est comme d’hab ces polar « cosy », à savoir du faux victorien par une Américaine qui n’y voit que l’aspect « pittoresque » et brode une comédie gentillette et fort peu réaliste, ici une gouvernante d’un flic de Scotland Yard complètement inepte, pour lequel elle résout les enquêtes en douce et à sa place. Ca se laisse lire mais c’est surtout bon lorsqu’on est si fatigué que le cerveau ne marche plus qu’en mode lent…

Bref, ensuite lu un peu de la production de mes petits camarades, à savoir La Stratégie des as de Damien Snyers chez Actusf – moué bof, c’est amusant mais trop peu écrit (des verbes être et avoir par pleines brassées), le côté film de casse transposé en fantasy un peu steampunk est fort plaisant mais ça reste trop léger pour mon goût, plus de la fanfic qu’une littérature aboutie. Enfin c’est court, vite lu, sans prétentions. Lu aussi le deuxième Nabil Ouali (chez Mnemos), et là en revanche c’est de la belle littérature, et en fantasy un projet narratif assez surprenant : alors que tant d’auteurs, comme par exemple Platteau ou Jaworski, « déplient » absolument tout, ce qui conduit à des tomes énormes, Nabil Ouali a au contraire le parti-pris de ne garder, de ne livrer, d’une saga que les scènes essentielles. Et comme il a du talent, chacune de ces scènes clefs sont parfaitement maîtrisées, on saisi bien l’enjeu de l’ensemble sans aucune pesanteur ni longueur, l’effet est même d’une singulière poésie au sein de la fantasy. Seul problème, aucun personnage ne pouvant être développé, ils ne sont que des noms, il manque une dimension peut-être. Mais en l’état je trouve le projet narratif fort intéressant et plutôt réussi.

Court est aussi Eos de GD Arthur, chez Mnemos également. On a un beau début en forme de fantasy pastorale, je n’aurai pas été contre tout un roman comme cela (mais c’aurait été invendable je suppose), puis une scène de violence, puis un développement plutôt sociétale et tendant vers l’utopie, ce qui en fantasy est carrément original (Parleur est le seul autre exemple que je connaisse). La langue est très littéraire – un peu trop maniérée pour moi -, les perso pas assez développés là encore (problème de vouloir faire une fantasy courte) et un gros défaut, le protagoniste est un peu petit con chiant, j’ai beaucoup de mal avec les persos antipathiques. Enfin, le côté un peu mystique ne me parle jamais, mais ça c’est personnel. Pour moi un bon premier roman, ambitieux.