#2948

Lisant tout à l’heure un article sur le drapeau breton noir et blanc qui va certainement flotter bientôt sur la mairie de Nantes, je me suis dit que s’il fallait un drapeau à Bordeaux alors il serait peut-être bleu, blanc, gris : comme le ciel changeant de ce dimanche, qui passait en un instant d’une « transparence de ciel napolitain » au voile sombre d’une averse puis lumière nette, passage de nuages blancs et ainsi de suite. Mais le soir éteint les couleurs et il fera bientôt nuit en cet automne atlantique.

#2947

Je rêve souvent de Roland, mais cette nuit je sais sans doute pourquoi il faisait ainsi partie des personnages de mon cinéma mental : je viens de relire son roman Folles années folles, un inédit de jeunesse (1980, il avait à peine 20 ans) que les Moutons électriques sortent à tirage ultra limité (300 ex) pour les souscripteurs d’un « crowdfunding ». Pas un texte qui serait publiable en librairie, trop inabouti et immature, mais un bon document sur les débuts de l’auteur, les années 80 de banlieues (les premiers chapitres) et la construction d’un imaginaire. Chez l’imprimeur en fin de semaine.

#2946

Faire quelques pas dehors et passer la main dans les tomatiers, dans les romarins et sur la bouillée de thym (« bouillée » est un terme tourangeau, cherchez pas) afin de respirer les bonnes odeurs, c’est le sublime minuscule d’un bout de jardin, si petit soit-il. Un plaisir olfactif, les senteurs, vertes, piquantes, sucrées. L’autre soir, la petite chatte tricolore en rentrant du dehors avait son pelage qui embaumait le thym, pas besoin de se demander où elle venait de dormir (un grand principe félin, cela : faire une bonne sieste avant de se coucher, afin d’être bien reposée pour dormir la nuit).

#2945

Marchant dans la douceur du soir et par les rues à peine teintées de rose sous le ciel d’un bleu sombre, je me persuaderais presque que le désordre du monde n’atteint pas la tranquillité sud-bordelaise. Illusion certes, et sans même songer aux couteaux qui jaillissent du côté de la gare, le passage trop rapide d’une voiture où boum-boum l’agression vulgaire et scandée d’un gangsta-rap remet bien vite en mémoire un certain culte de la malveillance – mais je continue du même pas et, canne en main, poursuis mon chemin.